La loi solidarité et renouvellment urbain - SRU dans un contexte d'extension de l'unité urbaine toulousaine
C’était dur d’avoir 20 ans en 2020
Le 13 décembre 2020, la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU) fêtait ses 20 ans. Elle est à l’origine des outils de l’urbanisme contemporain : schéma de cohérence territoriale, plan local d’urbanisme, carte communale, …, qui rythment désormais le quotidien des élus locaux en charge de l’urbanisme.
Pensés dans une démarche de développement durable, concept émergeant à la fin du siècle dernier, ces outils venaient moderniser les documents cadres alors en vigueur en matière d’aménagement et de construction : schéma directeur, plan d’occupation des sols, plan d’aménagement de zone.
Mais ce que l’on retient surtout de la loi SRU c’est son article 55 visant à imposer une certaine mixité sociale qui marqua fortement les débats au cours de l’année 2000. Jugée « totalitaire, absurde et inapplicable » par ses détracteurs qui y voyaient une « arrière-pensée électorale » à la veille des élections municipales.
Pour accroître et mieux répartir le parc social, l’article 55, traduit dans le code de la construction et de l’habitation à l’article L.302-5, impose d’atteindre un quota de 20 ou 25 % de logements sociaux, par rapport à l’ensemble des logements, dans les communes dont la population est supérieure à 3 500 habitants (1 500 en Île-de-France), qui sont comprises dans une agglomération (au sens du recensement de la population ), ou une intercommunalité de plus de 50 000 habitants, comptant au moins une commune de plus de 15 000 habitants.
Révisé notamment par les lois sur le droit au logement opposable (DALO - 2007), pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR - 2014), Egalité et citoyenneté (2017) et d’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN - 2018), le principe initial promulgué il y a deux décennies n’a jamais été remis en question et semble aujourd’hui faire l’objet d’un consensus dépassant les clivages politiques.
L’unité urbaine de Toulouse s’agrandit, un impact à prévoir pour certaines communes ?
Le concept d’unité urbaine est avant tout géographique et statistique. Selon l’INSEE, les unités urbaines (ou agglomérations) reposent sur la continuité du bâti et le nombre d’habitants. Elles sont définies de la manière suivante : une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants.
Ce principe d’unité urbaine ou d’agglomération sert de référence pour l’application de l’article 55 de la loi SRU afin d’identifier les communes qui doivent obligatoirement répondre aux objectifs de mixité sociale.
Ainsi, les communes de plus de 3 500 habitants nouvellement entrées dans l’unité urbaine pourraient désormais se voir imposer un quota de 20 ou 25 % de logements sociaux à atteindre à l’issue de 5 périodes triennales pleines à compter de 2023 (soit un objectif à atteindre en 2037), sachant que des objectifs de production progressive sont définis lors de chaque période triennale et que de premiers objectifs pourraient également être assignés sur la période triennale déjà entamée (2020-2022).
En 2020, l’unité urbaine de Toulouse s’est agrandie et compte désormais 81 communes. Neuf communes supplémentaires de Haute-Garonne sont intégrées à l’agglomération toulousaine (Bouloc, Castelnau-d'Estrétefonds, Fonsorbes, Fontenilles, Mondouzil, Saint-Rustice, Saubens, Vacquiers et Villeneuve-lès-Bouloc), tout comme deux communes Tarn-et-Garonnaises (Grisolles et Pompignan), alors que trois autres communes n’y figurent plus (Pin-Balma, Lauzerville et Auzielle).
Cette évolution résulte du fort dynamisme démographique de certaines communes, mais également d’un changement de méthode dans la définition des unités urbaines à l’échelle nationale.
Au regard du poids démographique actuel des communes qui intègrent l’unité urbaine, 4 d’entre elles devraient prochainement se voir assigner des objectifs de production de logements sociaux, en excluant Fonsorbes qui par son appartenance au Muretain Agglo était déjà concernée : il s’agit des communes de Bouloc, Castelnau d’Estrétefonds, Fontenilles et Grisolles.
Un bilan plutôt positif en Haute Garonne
Dans le département, 45 communes sont comprises dans le périmètre d’application de l’article 55 de la loi SRU.
Pour toutes ces communes de Haute Garonne, l’objectif unique fixé, actuellement, est d’atteindre 20 % de logements locatifs sociaux (dont 30% de logements dits très sociaux) d’ici 2025.
Les objectifs de production sont définis par période triennale et prévoient qu’au bout de 15 ans (5 périodes triennales) la commune ait atteint le taux de 20 % de parc social. Généralement, cet objectif est traduit dans les programmes locaux de l’habitat (PLH) et les plans locaux d’urbanisme (PLU).
Une dizaine de communes du département ont déjà atteint cet objectif et on peut estimer que d’ici 5 ans, près de la moitié des communes concernées pourraient l’atteindre ou s’en rapprocher fortement dans les délais impartis.
A l’échelle du département, les derniers bilans triennaux sont plutôt positifs, une minorité de communes n’atteignent pas leurs objectifs chiffrés et seulement trois communes ont fait l’objet d’un arrêté de carence. Un nombre en deçà des chiffres constatés sur les autres départements d’Occitanie fortement impactés par la loi SRU (communes du littoral méditerranéen notamment).
Selon les services de l’Etat, le montant global des pénalités appliquées à 31 communes de Haute-Garonne au titre de l’année 2018 était de 1,1 millions d’euros, déduction faite de 733 000 euros de dépenses réalisées par les communes en faveur d’opérations de logements sociaux. A noter que les montants prélevés sont ensuite reversés en priorité aux intercommunalités compétentes sur le champ de l’habitat.
La prolongation de la loi SRU en question
A l’exception des communes soumises à ces obligations à compter du 1er janvier 2015, pour lesquelles le délai sera dans tous les cas d’au moins 15 ans (5 périodes triennales), la loi SRU fixe comme date butoir 2025 pour l’atteinte des objectifs, sans perspectives au-delà de cette date ce qui peut poser problème pour que les quotas soient mathématiquement tenables dans certaines communes et ce malgré leur volontarisme. Fin 2020, Emmanuelle WARGON, ministre déléguée chargée du logement, déclarait son intention de vouloir prolonger la loi SRU au-delà de 2025 et de renforcer les sanctions financières pour les communes récalcitrantes.
Le gouvernement a d’abord proposé de définir par ordonnance pour la période post 2025 les objectifs de construction de logements sociaux dans le cadre de l’avant-projet de loi confortant le respect des principes de la république (article 28). Mais cette première approche a été abandonnée suite au mécontentement de certains élus locaux et de parlementaires compte tenu de la méthode envisagée qui laissait peu de place à la concertation.
Ainsi, Jean Castex précisait il y a quelques semaines que des textes à part entière seraient présentés le moment venu par le gouvernement sans s’engager sur la nature législative de ces derniers.
Le logement social fait désormais partie du paysage, mais nous pouvons parier que la loi SRU fera encore parler d’elle en 2021. En Haute-Garonne, la mixité sociale est parfois prise en compte au-delà du principe imposé par la loi. Les schémas de cohérence territoriale, les programmes locaux de l’habitat et certains plan locaux d’urbanisme fixent des objectifs de logements sociaux à produire sur des communes ou la loi SRU ne l’impose pas.
Si ces principes et objectifs se heurtent parfois aux stratégies des bailleurs sociaux absents sur de nombreux territoires du département, il faut noter que des communes, parfois très rurales, n’hésitent pas à valoriser directement leur patrimoine par la création de logements locatifs accessibles lors de travaux de rénovation (anciennes mairies, écoles ou presbytères).
En vingt ans, le principe de la mixité sociale a fait son chemin parmi les élus locaux et a parfois dépassé les limites des agglomérations visées par la loi.
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