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    La mise a disposition de locaux communaux pour l’organisation de réunions électorales

    1. Le principe de la liberté des réunions électorales
    2. Les conditions de la mise à disposition des locaux communaux pour l’organisation de réunions électorales
      1. Les partis politiques peuvent-ils utiliser les locaux communaux ?
      2. Le maire peut-il refuser la mise à disposition des locaux communaux ?
      3. Quel tarif appliquer à la location de locaux communaux aux partis politiques ?
      4. Focus sur l’utilisation des locaux scolaires pour les réunions électorales

    Compte tenu du contexte électoral du printemps prochain, les maires sont sollicités par les partis politiques ou directement par les candidats pour la location de salles municipales afin d’y organiser des réunions électorales.

    Comment le maire doit-il traiter ce type de demande ? Est-il en mesure de refuser cette location ? Quelle tarification appliquer à cette mise à disposition ?

    Voilà autant de questions auxquelles répond cette fiche technique.

    Le principe de la liberté des réunions électorales

    Aux termes de l’article 5 de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion, « la réunion électorale est celle qui a pour but le choix ou l’audition de candidats à des fonctions publiques électives, et à laquelle ne peuvent assister que les électeurs de la circonscription, les candidats, les membres des deux chambres et le mandataire de chacun des candidats ».

    L’article L.47 du code électoral précise que « les conditions dans lesquelles peuvent être tenues les réunions électorales sont fixées par la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion et par la loi du 28 mars 1907 relatives aux réunions publiques ».

    Ainsi, les réunions électorales sont libres et peuvent se tenir sans autorisation ou déclaration préalable (articles 1ers des lois de 1881 et 1907) : la tenue d'une réunion portant sur des questions électorales avant l'ouverture de la campagne n'est pas irrégulière (Conseil Constitutionnel, 8 juin 1967, n° 67-361), ni même la tenue d'une réunion la veille du scrutin, jusqu'à minuit, (Conseil Constitutionnel, 24 septembre 1981, n°81-926).

    Elles ne peuvent toutefois être tenues sur la voie publique. Cette interdiction n’est pas absolue : elle signifie seulement qu’une réunion ne peut se tenir sur la voie publique sans autorisation.

    Elles ne peuvent pas non plus se prolonger au-delà de onze heures du soir, sauf dans les communes où les établissements publics ferment plus tard (dans ce cas, les réunions pourront se prolonger jusqu’à l’heure fixée pour la fermeture de ces établissements) (article 6 de la loi de 1881).

    De plus, chaque réunion doit avoir un bureau composé de trois personnes au moins. Ce bureau est chargé d’assurer la police de la réunion, c’est-à-dire de maintenir l’ordre, d’empêcher toute infraction aux lois, d’interdire tout discours contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs, ou contenant provocation ou acte qualifié crime ou délit (article 8 de la même loi). Les candidats devront donc veiller à ne pas proférer, à l'égard de leurs adversaires, des propos diffamatoires ou injurieux.

    Un fonctionnaire peut également être délégué par le préfet ou le maire pour assister à la réunion (article 9).

    Par ailleurs, les réunions organisées dans les locaux communaux dans la cadre de la campagne politique ne doivent pas être de nature à constituer une infraction pénale (incitation à la haine raciale, à une diffamation, etc.).

    Pour finir, il convient de souligner que le maire ne peut interdire une réunion que si des risques graves de troubles à l’ordre public imposent une telle décision (CE, 29 décembre 1997, n° 164299).

    Les conditions de la mise à disposition des locaux communaux pour l’organisation de réunions électorales

    La mise à disposition de locaux communaux au profit de partis politiques ou de candidats soulèvent trois problématiques principales.

    Les partis politiques peuvent-ils utiliser les locaux communaux ?

    L’article L.2144-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT) précise que des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, les syndicats ou partis politiques qui en font la demande.

    Selon ce même article, il appartient au maire de déterminer les conditions dans lesquelles les locaux peuvent être utilisés. Pour cela, il doit tenir compte des nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public.

    L’utilisation des salles communales pour des réunions électorales n’est pas irrégulière dans la mesure où le prêt de salles est accordé dans les mêmes conditions aux différents candidats (CE, 29 juillet 2002, n° 239783 ; CE, 17 décembre 2003, n° 254864).

    Au nom du principe d’égalité, tous les partis politiques peuvent revendiquer un droit d’accès aux locaux communaux (CE, 15 octobre 1969, n° 73563 ; CE, 23 juin 1993, n° 142046).

    Les conditions de mise à disposition doivent être les mêmes pour tous les candidats. Aucune discrimination ne doit être opérée entre eux (CC, 25 novembre 1997, n° 97-2275 AN).

    Toutefois, s'il existe un droit d'accès aux locaux communaux pour les réunions électorales, les communes n'ont en revanche aucune obligation de fournir un local constituant la permanence électorale d'un candidat.

    Le maire peut-il refuser la mise à disposition des locaux communaux ?

    Les motifs de refus du prêt d’une salle sont limitativement énumérés par l’article L.2144-3 du CGCT précité. Il s’agit :

    • Des nécessités de l’administration communale: le maire doit être en mesure d’établir que la commune ne dispose d’aucun local (salle de réunion, salle des fêtes ou gymnase par exemple) dans lequel une réunion publique pourrait se tenir. A noter que seuls les locaux appartenant au domaine public de la commune peuvent être mis à disposition en vue d’une réunion électorale (Conseil d’Etat, 7 mars 2019 n°417629). Les locaux appartenant au domaine privé sont donc exclus.
    • Du fonctionnement des services administratifs : un maire peut refuser la mise à disposition d’un local au motif qu’elle est incompatible avec le bon fonctionnement du service public. Par exemple, et a contrario, le juge a estimé illégal le refus d’un maire de mettre à disposition un centre des congrès, pour une université d’été d’un parti politique, parce que ce refus était basé sur le fait que le parc entourant les locaux devait rester ouvert au public. Dans cette affaire, le juge a relevé que le parc ne constituait qu’une modeste partie des espaces verts ouverts au public et que la manifestation prévue n’était pas incompatible avec le maintien de son ouverture au public (CE, 19 août 2002, n° 249666).
    • Du maintien de l’ordre public: le juge peut enjoindre au maire de répondre favorablement à la demande de location de salles après avoir vérifié la réalité des troubles à l’ordre public qui peuvent survenir à l’occasion de l’utilisation des locaux communaux. (CE, 19 août 2002, n° 249666 précitée).

    Par contre s’il y a réellement menace à l’ordre public et à l’intégrité matérielle des locaux communaux, le maire peut justifier une décision de refus de la salle communale (CAA Lyon, 30 mai 2006, n° 01LY01853).

    En dehors de ces hypothèses, tout refus justifié par un motif autre que ceux-ci est illégal (CE, 21 mars 1979, n° 07117). Le juge considère qu'un refus illégal est critiquable dans la mesure où il fait obstacle à l'exercice du droit d'un candidat à tenir des réunions en période électorale (CE, 16 janvier 1980, n° 19155).

    Le refus de prêt d’un local communal fondé uniquement sur le fait que l’association a un caractère politique est illégal (CE, 30 avril 1997,n° 157115). Il en est de même lorsque le motif de refus est fondé sur la nature de la formation politique (CE, 15 mars 1996, n° 137376). A l’inverse, en cas de menace avérée à l’ordre public et à l’intégrité matérielle des locaux communaux, le maire peut justifier une décision de refus de la salle communale (CAA Lyon, 30 mai 2006, n° 01LY01853).

    Enfin, le juge peut enjoindre au maire de répondre favorablement à la demande de location de salles après avoir vérifié la réalité des troubles à l’ordre public qui peuvent survenir à l’occasion de l’utilisation des locaux communaux (CE, 19 août 2002, n° 249666).

    Lorsque le refus de mise à disposition constitue une rupture du principe d'égalité de traitement entre les candidats, le juge peut être conduit à annuler les opérations électorales lorsque l'écart de voix est très faible entre les candidats (TA Montpellier, 15 décembre 1995: le refus opposé à un candidat adverse d'utiliser les locaux communaux alors que le maire sortant a pu les utiliser méconnaît le principe d'égalité et justifie l'annulation des opérations électorales en raison du faible écart de voix entre les deux candidats).

    Cependant, lorsque le candidat, malgré une interdiction de réunion, a été mis à même d'exprimer ses idées par tous les moyens légaux, l'annulation des élections ne se justifie pas (CE Sect., 4 Décembre 1992, n° 136077 136206 136220 136285 140246 : « considérant qu'à l'occasion de la visite en Corse de M. Le Pen, président du Front National, dont se réclamait l'une des listes en présence, des troubles se sont produits qui ont conduit le Préfet a annulé la réunion électorale que devait tenir M. Le Pen à Ajaccio ; que les candidats se réclamant du Front National ont cependant été mis à même d'exprimer leurs idées par tous les moyens légalement à leur disposition, ainsi que par voie radiophonique et télévisuelle ; que par suite la circonstance que le Préfet de police de la Corse ait été conduit à interdire la réunion susmentionnée n'est pas de nature à justifier l'annulation de l'élection »).

    Quel tarif appliquer à la location de locaux communaux aux partis politiques ?

    Il revient au conseil municipal de fixer, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation (article L.2144-3 alinéa 3 du CGCT). La location de la salle peut donc se faire à titre gratuit ou onéreux.

    La mise à disposition des locaux communaux à un candidat ou un parti politique doit, en principe, être consentie dans les conditions financières du marché pour éviter d’être qualifié de financement prohibé au sens de l'article L.52-8 alinéa 2 du code électoral qui interdit à une personne morale de droit public de « participer au financement de la campagne électorale d'un candidat ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux habituellement pratiqués ».

    Toutefois, le juge administratif considère que la gratuité ne constitue pas un avantage en nature, et ne contrevient donc pas aux dispositions de l’article L.52-8 susvisé, dans la mesure où tous les candidats en bénéficient (CE, 30 décembre 1996, n° 177179).

    De plus, il a été jugé qu'une salle mise à la disposition gratuite d'un candidat, dès lors que les autres « ont pu disposer de facilités analogues », ne constituait pas une dépense de campagne (voir notamment CE, 18 décembre 1992, n° 135650 139894 ; CE, 20 mai 2005, n° 274400 ; CE, 8 juin 2009, n° 322236).

    La solution est évidemment différente si la manifestation organisée dans cette salle tend par exemple à organiser une émission de radio ou de télévision qui présente le caractère de propagande politique en faveur du candidat ou de sa liste (CE, 7 mai 1993, n° 135815).

    Focus sur l’utilisation des locaux scolaires pour les réunions électorales

    L’utilisation des locaux scolaires durant les campagnes électorales est traditionnellement autorisée pour favoriser les réunions des candidats, sous réserve toutefois de respecter les dispositions des articles L.47 du code électoral et L.212-15 du code de l’éducation.

    L’article L.212-15 du code de l’éducation autorise en effet le maire à utiliser les locaux scolaires en dehors des heures scolaires sous la condition que ces activités soient compatibles avec « la nature des installations, l’aménagement des locaux et le fonctionnement normal du service » et respectent les principes de neutralité et laïcité.

    Saisi pour avis sur cette question, le Conseil d’Etat a considéré que « si l’article 25 de la loi du 22 juillet 1983 [désormais article L.212-15 du code de l’éducation] donne au maire la faculté d’utiliser des locaux scolaires pour que s’y déroulent des activités à caractère culturel, sportif, social ou socio-éducatif, il ne résulte ni des termes mêmes de cet article, ni des travaux préparatoires de cette loi que le législateur ait entendu, en permettant l’ouverture des locaux scolaires à des activités dont il a fixé la liste, de revenir sur l’usage qui permet leur utilisation pour la tenue de réunions électorales » (CE Avis, 2 mai 1995, n° 357502).

    A ce jour, cet usage n’a pas été remis en cause.

    L’organisation de réunions électorales dans l’enceinte des locaux scolaires est donc possible, sous réserve :

    • que le maire ait, pour cela, donné son autorisation ;
    • qu’elle ait lieu en dehors de la période d’utilisation des locaux pour les besoins de l’enseignement ;
    • que ces réunions soient organisées à la seule initiative des candidats et en totale indépendance ;

    que ces réunions s’adressent aux électeurs, non aux élèves.



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°297

    Date :

    1 novembre 2019

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