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    L’impact de la loi ELAN sur les autorisations d’urbanisme (loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique)

    La loi ELAN a été publiée au journal officiel le 24 novembre 2018. La plupart des mesures qu’elle comprend sont d’application immédiate, certaines étant toutefois conditionnées à la publication d’un décret ou d’une ordonnance.

    Compte tenu du nombre d’articles de la loi (234) qui impactent de nombreux domaines et codes, les fiches techniques réalisées par le service urbanisme de l’ATD seront réparties sur les numéros de décembre 2018 et janvier 2019 d’ATD Actualité.

    Ces fiches ne porteront que sur les mesures ayant un impact sur les différents domaines de l’urbanisme et concernant en particulier les collectivités de la Haute-Garonne. Un article plus général présentera l’ensemble de la loi. D’autres fiches seront publiées ultérieurement au fur et à mesure de la sortie des ordonnances et décrets.

    Gestion des Autorisations du Droit des Sols (ADS)

     - L’article 57 de la loi, vient réaffirmer par l’insertion d’un nouvel alinéa à l’article L.423-1 du code de l’urbanisme (CU) la garantie faite aux pétitionnaires, et aux professionnels qui les assistent dans leur demande d’autorisation d’urbanisme, de la limitation au strict nécessaire des pièces exigibles pour la constitution de leur dossier : « Le dossier joint à ces demandes et déclarations ne peut comprendre que les pièces nécessaires à la vérification du respect du droit de l’Union européenne, des règles relatives à l’utilisation des sols et à l’implantation, à la destination, à la nature, à l’architecture, aux dimensions et à l’assainissement des constructions et à l’aménagement de leurs abords ainsi que des dispositions relatives à la salubrité ou à la sécurité publique ou relevant d’une autre législation dans les cas prévus au chapitre V du présent titre. »

     - L’article 58 précise à l’article L.424-5 du CU que le dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation d’urbanisme sur un terrain pour lequel une autorisation a déjà été délivrée est possible et ne nécessite pas un retrait préalable de celle-ci. Ce dépôt n’entraine pas non plus un retrait implicite de la première autorisation. Les deux autorisations peuvent donc coexister.

     - L’article 60 modifie l’article L.425-14 du CU et précise que lorsqu’un projet est soumis à autorisation ou à déclaration environnementale les permis de construire ou les déclarations préalables ne peuvent pas être mis en œuvre avant la délivrance de ces autorisations ou déclarations. Cette mesure ne s’applique pas en principe aux permis de démolir.

     - L’article 62 confirme le report au 1er janvier 2022 de l’obligation pour les communes de plus de 3500 habitants de mettre en œuvre d’une téléprocédure spécifique leur permettant de recevoir et d’instruire sous forme dématérialisée les demandes d’autorisation d’urbanisme déposées à compter de cette date. La téléprocédure peut être mutualisée au travers du service en charge de l’instruction des actes d’urbanisme (article L.423-3 du CU). 

     - Le même article 62 précise à l’article L.423-1 du CU que l’instruction peut être confiée par l’organe délibérant de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale à un ou des prestataires privés dans la mesure où l’autorité compétente conserve la signature des actes d’instruction. 

    Toutefois, ces prestataires privés ne peuvent pas se voir confier des missions qui les exposeraient à un intérêt privé de nature à influencer, ou paraître influencer, l’exercice indépendant, impartial et objectif de leurs fonctions. Ils agissent sous la responsabilité de l’autorité du maire et celui-ci garde l’entière liberté de ne pas suivre la proposition du ou des prestataires.  

    Les missions qui sont confiées à ces prestataires ne doivent entraîner aucune charge financière pour les pétitionnaires.

    Un décret en Conseil d’Etat viendra préciser les modalités d’application de cette disposition.

     - L’article 63 dispense les coopératives d’utilisation de matériel agricole du recours obligatoire à un architecte (article L.431-3 du CU).

     - L’article 222 prévoit que, à titre expérimental du 24 décembre 2018 au 31 décembre 2022,  les déclarations préalables, permis de construire ou d’aménager concernant les projets d’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile, ne pourront plus faire l’objet d’un retrait par l’auteur de l’acte. Seule une annulation contentieuse, pourrait  alors être envisagée dans le cas d’une illégalité (par dérogation à l’article L.424-5 du CU).

    Cette mesure fera l’objet d’un bilan gouvernemental qui devra intervenir au plus tard le 30 juin 2022.

     - L’article 59 complète  l’article L.410-1 du CU en indiquant que lorsqu’un certificat d’urbanisme mentionne qu’un sursis à statuer peut être opposé à une déclaration préalable ou une demande de permis, il doit préciser expressément la ou les circonstances qui justifient la mise en œuvre de ce sursis.

    Lotissement

     - L’article 2 la loi ELAN vient modifier l’article L.441-4 du code de l’urbanisme (CU) en élargissant l’obligation du concours d’un architecte, pour déposer le dossier pour les permis d’aménager de lotissements de plus de 2500 M², à la profession des paysagistes concepteurs. Les porteurs de projet disposeront de la liberté de choix pour le montage du permis d’aménager entre ces deux professions.

     - Dans l’article 47, le régime juridique des cahiers des charges de lotissement est modifié. Préalablement, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014 avait tenté d’introduire, pour les cahiers des charges ayant ou non fait l’objet d’une approbation par le préfet, une caducité de leurs dispositions devenues règlementaires. Cette tentative est restée relativement infructueuse dans la mesure où les stipulations contractuelles demeurent applicables à vie entre les colotis. Aussi, la loi ELAN a supprimé les trois derniers alinéas de l’article L.442-9 du CU renforçant la caducité de ces dispositions.

     - L’article 48 permet d’engendrer une constructibilité supplémentaire des espaces libres constitués des parties communes des lotissements. Ainsi, les colotis pourront modifier l’affectation des parties communes du lotissement à la majorité qualifiée et non à l’unanimité.

     - L’article 49 clarifie le point de départ du délai de stabilisation de cinq ans de la règlementation d’urbanisme applicable à l’intérieur du périmètre du lotissement, régi par l’article L.442-14 du CU. Dans le cas d’un lotissement autorisé par une déclaration préalable, le point de départ est la date de non opposition à cette autorisation d’urbanisme. Dans le cas d’un permis d’aménager la stabilisation de la règlementation applicable intervient à la date d’octroi du permis, et pour 5 ans, à compter du dépôt de la déclaration d’achèvement de conformité des travaux.

    - L’article 80, au travers de l’article L.442-14 du CU renforce la stabilisation de la règlementation applicable à l’intérieur du périmètre d’un lotissement. Ainsi, lorsque le document d’urbanisme supérieur (SCoT, PLU ou carte communale) a été annulé par une décision de justice pour un motif étranger aux règles d’urbanisme applicable au lotissement, les règles de celui-ci sont maintenues malgré l’annulation.

    Droit de visite  (article 77 de la Loi)

     - Le droit de visite des lieux accueillant ou susceptibles d'accueillir des constructions, aménagements, des installations et des travaux qui sont soumis au code de l’urbanisme s’exerce désormais pendant les travaux et jusqu’à 6 ans après leur achèvement (article L.461-1 et suivants du CU). Durant cette période, le préfet, le maire ou les agents mentionnés à l’article L.480-1 du CU peuvent également se faire communiquer tous documents se réalisant aux opérations concernées.

     - Ce droit de visite et de communication peut s’exercer entre 6 heures et 21 heures et, en dehors de ces heures, lorsque ces lieux sont ouverts au public.

    Toutefois, les domiciles et les locaux comportant des parties à usage d’habitation ne peuvent être visités qu’entre 6 heures et 21 heures, avec l’assentiment écrit de l’occupant ou, à défaut, en présence d’un officier de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale relatives aux visites domiciliaires, perquisitions et saisies de pièces à conviction.

    De même, avant d’accéder aux établissements et locaux professionnels, il convient  d’en informer le Procureur de la République, qui peut s’y opposer.

     - L’article L.461-3 du CU précise désormais que lorsque l’accès à un domicile ou à un local comprenant des parties à usage d’habitation est refusé ou que la personne ayant qualité pour autoriser l’accès à ce domicile ou à ce local ne peut être atteinte, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter. L’ordonnance comporte l’adresse des lieux à visiter, le nom et la qualité des agents habilités à procéder aux opérations de visite ainsi que les heures auxquelles ces agents sont autorisés à se présenter. L’ordonnance est exécutoire par provision.

     - L’ordonnance est notifiée sur place au moment de la visite à l’occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’ordonnance est notifiée après la visite, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l’avis. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l’ordonnance par acte d’huissier de justice.

    De plus, l'acte de notification comporte mention des voies et délais de recours contre l'ordonnance ayant autorisé la visite et contre le déroulement des opérations de visite. Il mentionne également que le juge ayant autorisé la visite peut être saisie d'une demande de suspension ou d'arrêt de cette visite.

     - La visite s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention qui l’a autorisée. Le juge des libertés et de la détention peut, s’il l’estime utile, se rendre dans les locaux pendant l’intervention. À tout moment, il peut décider la suspension ou l’arrêt de la visite. La saisine du juge des libertés et de la détention aux fins de suspension ou d’arrêt des opérations de visite n’a pas d’effet suspensif, c’est-à-dire qu’elle n’interrompt pas ces dernières.

     - La visite est effectuée en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant, qui peut se faire assister d’un conseil de son choix. En l’absence de l’occupant des lieux, les agents chargés de la visite ne peuvent procéder à celle-ci qu’en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.

     - Un procès-verbal relatant les modalités et le déroulement de l’opération et consignant les constatations effectuées est dressé immédiatement par les agents qui ont procédé à la visite. Le procès-verbal est signé par ces agents et par l’occupant des lieux ou, le cas échéant, son représentant et les témoins. En cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.

    L’original du procès-verbal est adressé au juge qui a autorisé la visite. Une copie du procès-verbal est remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à l’occupant des lieux ou à son représentant.

    Le procès-verbal mentionne le délai et les voies de recours.

     - L’ordonnance autorisant la visite peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la cour d’appel. Cet appel est formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la notification de l'ordonnance. Cet appel n'est pas suspensif.

     - L’ordonnance du premier président de la cour d’appel est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours.

     - L’article L.461-4 du CU indique que lorsque, à l’issue de la visite, il est établi qu’une construction, un aménagement, une installation ou des travaux ont été réalisés sans permis ou sans décision de non-opposition à déclaration préalable, ou en méconnaissance d’un permis ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable, le préfet ou le maire peuvent mettre en demeure le maître d’ouvrage, dans un délai qu’ils déterminent et qui ne peut excéder six mois, de déposer une demande de permis ou une déclaration préalable selon le cas. 

     - Les peines prévues à l’ancien article L.480-12 du CU sont alourdies. Ainsi, le fait de faire obstacle aux fonctions exercées par les autorités, fonctionnaires et agents habilités à exercer les missions de contrôle administratif prévues dans le cadre du droit de visite ou de la recherche et de la constatation des infractions prévues par le code de l’urbanisme est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende contre un mois et 3 750 € auparavant.

     Contentieux (article 80 de la loi)

     La loi ELAN réforme un certain nombre de points du contentieux de l’urbanisme.

    Ces dispositions entreront en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la publication de ladite loi, soit le 1er janvier 2019.

     L’article L.421-9 du CU prévoit que le refus de permis de construire ou la décision d’opposition de déclaration préalable ne peut être fondé sur l’irrégularité de la construction initiale si celle-ci est achevée depuis plus de 10 ans.

    Une liste d’exceptions est ensuite prévue à l’article. La loi vient modifier l’une d’entre elles : ainsi la prescription décennale ne s’applique pas si la construction a été réalisée sans permis de construire, alors que celui-ci était requis.

    Le service instructeur et l’autorité compétente devront alors vérifier si la construction réalisée sans permis de construire y était réellement soumise au regard de son champ d’application à l’époque de l’achèvement.

    - L’article L.480-13 qui prévoit de l’action civil en vue de la démolition d’une construction est modifié. Cette action permet à une personne de demander la démolition d’une construction si un certain  nombre de conditions sont réunies :

    ü  le permis a été annulé pour excès de pouvoir par le juge administratif

    ü  et la construction se situe dans les zones spécifiques citées dans le même l’article

    La loi ELAN prévoit désormais que l’action civile en vue de la démolition d’une construction, qui a été édifiée conformément à un permis de construire annulé par le juge administratif, peut être intentée par le préfet de département, et ce même en dehors des zones spécifiques citées à l’article L.480-13 du CU précité. Dans tous les cas cette action civile en démolition ne peut être intentée que dans les 2 ans suivant la décision d’annulation du permis devenue définitive.

    - L’article L.600-1-1 règlemente les conditions d’introduction d’une action contentieuse pour la contestation d’une autorisation d’urbanisme par une association. Dorénavant celle-ci devra avoir déposée ses statuts en préfecture au moins 1 an avant l’exercice du recours. C’est un durcissement des conditions d’action contentieuse des associations.

    - L’article L.600-1-2 règlemente les conditions d’action de recevabilité d’un recours pour les personnes physiques ou morales. Les conditions de l’intérêt à agir sont étendues aux recours contre les déclarations préalables de travaux en plus des permis de construire, de démolir ou d'aménager. Pour apprécier cet intérêt, le texte prévoit de ne plus prendre en compte les nuisances générées par les travaux de construction, mais uniquement par le projet lui-même.

     - L’article L.600-3 portant sur le référé suspension est modifié et prévoit que la requête en référé suspension dirigée contre une autorisation d’urbanisme ne peut être introduite que jusqu’à l’expiration du délai fixé devant le juge saisi en premier ressort pour présenter des remarques dans le cadre du contentieux.

    - Les articles L.600-5 et L.600-5-1 prévoient qu’à l’occasion d’un recours le Président du tribunal administratif devra examiner lui-même la possibilité d’une régularisation, alors qu’auparavant il devait être saisi de conclusions en ce sens. Il pourra également sursoir à statuer pour permettre cette régularisation. Dans tous les cas, le juge devra motiver un refus d’annulation partielle ou un refus de sursis à statuer.

     - L’article L.600-7 ouvrait déjà une action en dommages et intérêts au bénéficiaire de l’autorisation de construire à l’encontre du requérant dont le recours « excédait la défense de ses intérêts légitimes » causant un préjudice « excessif » au bénéficiaire du permis. Cette action n’a jusqu’alors été que très peu utilisée en raison notamment de la difficulté à prouver le caractère excessif du préjudice.

    Les conditions de mise en œuvre de cet article sont donc assouplies en supprimant la condition d’un préjudice « excessif » et en qualifiant d’« abusif » le comportement du requérant. En outre, le second alinéa de cet article a été supprimé, ne reconnaissant plus ainsi aux associations de protection de l’environnement une présomption de défense de ses intérêts légitimes.

    L’article L.600-8 du CU prévoit les modalités liées à l’enregistrement des transactions donnant lieu au versement d’une somme d’argent en contrepartie d’un désistement à une action en annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou au renoncement à envisager une telle action.

    La loi ELAN interdit de conclure de telles transactions avec des associations (sauf dans l’hypothèse où elles agissent pour défendre leurs intérêts matériels propres).

     - Création d’un nouvel article L.600-12-1 qui précise que « L’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l’utilisation du sol ou à l’occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d’illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet. Le présent article n’est pas applicable aux décisions de refus de permis ou d’opposition à déclaration préalable. Pour ces décisions, l’annulation ou l’illégalité du document d’urbanisme leur ayant servi de fondement entraîne l’annulation de ladite décision ». 

    - L’article L.610-1 du CU prévoit désormais que l’exécution de travaux de construction conformes à une autorisation de construire définitive mais non conformes à un PLU ne constitue plus une infraction (sauf cas de fraude).



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°287

    Date :

    23 novembre 2018

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