La prise en compte de l'assainissement non collectif en urbanisme
Les enjeux
Le traitement des eaux usées par des systèmes non collectifs se doit de répondre à deux grands enjeux du Grenelle de l'environnement. Ces enjeux sont traduits dans le code de l'urbanisme dans l'article L121-1:
- au 1°b) : l'utilisation économe des espaces naturels et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestiers ;
- au 3° : la préservation de la qualité de l'air, de l'eau, du sol et du sous-sol...
En matière de traitement des eaux usées la complexité vient principalement de l'application de deux législations indépendantes qui se superposent: le code de l'urbanisme (CU) et le code général des collectivités territoriales (CGCT).
Les évolutions législatives récentes, dues aux lois Grenelle et à leurs décrets d'application, se traduisent par un changement d'approche dans la prise en compte du traitement des eaux usées, notamment de l'assainissement non collectif (ANC).
Rappel des règles de base
Le Schéma Communal d'Assainissement (SCA)
Au titre de l'article L2224-10 du CGCT, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) auxquels elles ont transféré cette compétence délimitent, après enquête publique:
- Les zones d'assainissement collectif (AC) où elles sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation de l'ensemble des eaux collectées ;
- Les zones relevant de l'assainissement non collectif où elles sont tenues d'assurer le contrôle de ces installations et, si elles le décident, le traitement des matières de vidange et, à la demande des propriétaires, l'entretien et les travaux de réalisation et de réhabilitation des installations d'assainissement non collectif ;
- Les zones où des mesures doivent être prises pour limiter l'imperméabilisation des sols et pour assurer la maîtrise du débit et de l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement ;
- Les zones où il est nécessaire de prévoir des installations pour assurer la collecte, le stockage éventuel et, en tant que de besoin, le traitement des eaux pluviales et de ruissellement lorsque la pollution qu'elles apportent au milieu aquatique risque de nuire gravement à l'efficacité des dispositifs d'assainissement.
L'expression « délimitent après enquête publique » implique que toute évolution de ce schéma communal d'assainissement, même légère, doit être soumise à enquête publique avant approbation.
Le dossier soumis à l'enquête comprend la délimitation des différentes zones et notamment fait apparaitre les agglomérations d'assainissement. Une notice justifiant le zonage envisagé complète le dossier (art. R2224-9 du CGCT).
L'obligation d'assainissement collectif
Elle est définie par deux articles du CGCT:
- le R2224-10 indique que: « les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans une agglomération d'assainissement (production d'une charge brute de pollution organique supérieure à 120 kg / jour, soit environ 2000 équivalent - habitant), doivent être équipées pour la partie concernée de leur territoire d'un système de collecte des eaux usées ». Il s'agit donc bien pour ces seules collectivités d'une obligation de réalisation d'un assainissement collectif ;
- A contrario, dans les autres territoires, l'article R2224-7 du CGCT prévoit que sont placés en zone d'ANC les secteurs dans lesquels « l'installation d'un système de collecte des eaux usées ne se justifie pas, soit parce qu'elle ne présente pas d'intérêt pour l'environnement et la salubrité publique, soit parce que son coût est excessif ». Ainsi, dans les parties de la commune comptant moins de 2000 équivalents - habitants le schéma communal d'assainissement devra s'appliquer à démontrer que l'ANC permet d'atteindre les objectifs de préservation de la qualité du milieu naturel, notamment aquatique, et qu'un assainissement collectif ne se justifie pas.
La prise en compte de l'anc lors de la réalisation ou de l'extension d'une construction
Du fait de l'indépendance des législations, et surtout depuis la réforme des autorisations d'urbanisme entrée en vigueur en octobre 2007, le service instructeur des autorisations d'urbanisme ne contrôle pas la conformité d'un dispositif d'assainissement non collectif.
Le contrôle préalable incombe au SPANC
Au titre de l'article L2224-8 III du CGCT, c'est au service public d'assainissement non collectif (SPANC), exercé par la commune ou l'établissement public auquel elle a transféré cette compétence, d'assurer le contrôle des installations d'ANC avant tout dépôt de demande de permis de construire ou d'aménager. Le texte précise que « dans les cas des installations neuves ou à réhabiliter, un examen préalable de la conception » doit être effectué par le SPANC.
De plus, depuis la loi engagement national pour l'environnement, dite Grenelle II, du 12 juillet 2010, le SPANC « peut fixer des prescriptions techniques, notamment pour l'étude des sols ou le choix de la filière ».
Enfin, depuis cette loi, peuvent être utilisés les dispositifs de traitement qui n'entrent pas dans la catégorie des installations avec traitement par le sol. Ils ont fait l'objet d'un agrément délivré par les ministres chargés de l'environnement et de la santé (59 de ces dispositifs ont été agréés entre le 9 juillet 2010 et le 14 mai 2012).
Le rôle de l'instructeur des autorisations d'urbanisme
Dans ce cadre, le service instructeur des autorisations d'urbanisme n'a pas à se préoccuper de la conformité de l'installation d'ANC, ce contrôle technique ne relevant pas de ses compétences.
C'est pourquoi le décret 2012-274 du 28 février 2012 entré en vigueur le 1er mars 2012 impose, dans les pièces à fournir obligatoirement au titre du dossier de demande d'autorisation d'urbanisme, « le document attestant de la conformité du projet d'installation d'assainissement non collectif au regard des prescriptions règlementaires, prévu au 1° du III de l'article L2224-8 du CGCT » (article R431-16 c) pour les permis de construire et R441-6 b) pour les permis d'aménager).
L'instructeur devra donc vérifier uniquement la présence de l'attestation préalable du SPANC confirmant la conformité de l'installation d'ANC, sauf prescription particulière justifiée imposée par le document de planification urbaine en vigueur sur la commune.
Les prescriptions complémentaires liées au document de planification
Tout d'abord, il convient de rappeler que pour les communes sous le régime du Règlement National d'Urbanisme (RNU) ou disposant d'une carte communale, aucune règle particulière ne peut poser de prescriptions complémentaires concernant l'assainissement non collectif. Notamment il n'est pas possible d'imposer une obligation de surface minimale de terrain constructible.
Du fait de l'indépendance des législations, seul le service public d'assainissement non collectif est habilité à délivrer l'attestation concernant la conformité de l'installation d'ANC. Le service instructeur ne peut pas s'opposer au projet s'il est accompagné d'une attestation positive du SPANC, aucune disposition légale nationale n'imposant de surface minimale constructible en cas d'assainissement non collectif.
Il en va autrement si la commune dispose d'un Plan Local d'Urbanisme (PLU) approuvé. Ce document peut prescrire de manière plus ou moins contraignante des règles supplémentaires, notamment en terme de surface minimale constructible.
Ces prescriptions complémentaires peuvent être de 3 types:
La délimitation des zonages d'assainissement par le Schéma Communal d'Assainissement:
- Au titre de l'article L123-1-5 11° le règlement graphique ou écrit peut délimiter les zonages d'assainissement collectif et d'assainissement non collectif et des eaux pluviales prévus à l'article L2224-10 du CGCT. Il conviendra de rester prudent dans ces délimitations, en particulier pour les secteurs pouvant passer à court ou moyen terme en AC et susceptibles d'accueillir momentanément de l'ANC.
- Au titre de l'article R123-14, les annexes comprennent, à titre informatif, les schémas des réseaux d'assainissement, en précisant les emplacements retenus pour les stations d'épuration des eaux usées. Il s'agit ici d'indiquer les réseaux d'eaux usées existants ou programmés et les stations d'épuration. Les zones où l'ANC est autorisé couvrent le reste du territoire.
Ces annexes peuvent comprendre parfois les cartes d'aptitudes des sols (CAS) qui préconisent des surfaces minimales de terrain en fonction des anciennes filières d'assainissement non collectif (dispositifs existants avant le 9 juillet 2010).
Il est préférable de ne pas inclure les CAS dans les annexes pour 3 raisons:
Légalement, elles ne sont pas obligatoires,
si les articles 4 et/ou 5 du règlement du PLU renvoient à cette annexe, cette préconisation entrainera des contraintes sur les surfaces constructibles, pas nécessairement justifiées.
toute évolution de ces cartes d'aptitudes des sols étant liée à l'évolution du schéma communal d'assainissement, nécessitera une procédure avec enquête publique.
En conséquence, les communes ayant intégré la CAS dans leur annexe du PLU auront intérêt à l'enlever. Cette modification des annexes du PLU relève d'une simple procédure de mise à jour (article R123-22 du code de l'urbanisme), constatée par un arrêté du maire.
Les conditions de réalisation de l'assainissement non collectif
- L'article 4 du règlement du PLU peut définir les conditions de desserte des terrains par les réseaux (articles L123-1-5 11° et R123-9-4° du code de l'urbanisme).
Cette préconisation est simple lorsque le terrain est desservi par le réseau de collecte des eaux usées, auquel cas toute construction a obligation de se raccorder à ce réseau.
- En cas d'assainissement non collectif, il est possible d'envisager une rédaction type, ainsi formulée:
« En l'absence de réseau public d'assainissement, les constructions ou installations nouvelles doivent être dotées d'un dispositif d'assainissement non collectif conforme aux dispositions règlementaires nationales en vigueur et agréées par les ministères de l'environnement et de la santé.
Lors de la demande de permis de construire ou d'aménager, conformément aux articles R431-16 c) et R441-6 b) du code de l'urbanisme, un document attestant de la conformité du projet d'installation d'assainissement non collectif au regard des dispositions règlementaires prévues à l'article L2224-8 III du code général des collectivités territoriales, devra être fourni. Dans le cadre de l'instruction par le service public d'assainissement non collectif de la conformité de l'installation d'ANC, il pourra notamment être demandé par le SPANC une étude de sol pour l'unité foncière concernée. »
Si le second alinéa ne semble pas indispensable dans la mesure où il ne fait que reprendre des dispositions légales qui seront de toute façon applicables, il a le mérite d'informer le futur demandeur des contraintes qui lui sont imposées en la matière.
La surface minimale de terrain constructible:
L'article 5 du PLU peut fixer une superficie minimale des terrains constructibles lorsque cette règle est notamment justifiée par des contraintes techniques relatives à la réalisation d'un dispositif d'ANC (articles L123-1-5 12° et R123 9 5° du code de l'urbanisme).
Il convient de noter que cet article n'est pas obligatoire. Par contre s'il est renseigné et fixe une surface, celle-ci s'imposera en terme de conformité, sans possibilité d'adaptation, même si l'attestation du SPANC autorise le dispositif d'assainissement non collectif sur une surface inférieure. Cette opposition peut être source de contentieux. Le PLU sera attaqué dans ce cas sur la justification des contraintes techniques qui ont conduit à la définition de la surface.
Il convient donc de s'assurer que cette justification s'appuie sur une étude sérieuse, une simple doctrine s'appliquant uniformément à tout le territoire départemental n'est pas dans ce cas suffisante comme l'a rappelé une réponse ministérielle du 30 juillet 2009, publiée dans le journal officiel du Sénat sous le N°7525. L'étude devrait notamment analyser si les 59 filières agréées (au 14 mai 2012) sont ou non réalisables sur l'ensemble des zones en ANC de la commune.
Il est donc préférable de s'abstenir de renseigner cet article et de laisser le soin au SPANC de décider de l'opportunité d'autoriser la construction en fonction de la filière d'assainissement non collectif prévue.
Si le PLU comprend déjà une règle de surface à l'article 5 du règlement que vous souhaitez supprimer, il conviendra de prévoir une procédure de modification du PLU, nécessitant une enquête publique.
Nous vous rappelons que HGI-ATD ne répond qu'aux sollicitations de ses adhérents. Toute demande de documentation, conseil ou assistance ne respectant pas cette condition ne pourra aboutir.