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    Vos questions/Nos réponses : Réglementation applicable aux sonneries des cloches : le maire peut-il couper leur son durant la nuit ?

    Vos Questions - Nos réponses

    Ce sont les dispositions de l’article 27 de la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Eglises et de l’Etat, qui fixent la réglementation applicable aux sonneries des cloches : « Les sonneries de cloches seront réglées par arrêté municipal, et, en cas de désaccord entre le maire et le président ou directeur de l'association cultuelle, par arrêté préfectoral.

    Le règlement d'administration publique prévu par l'article 43 de la présente loi [décret de 1906] déterminera les conditions et les cas dans lesquels les sonneries civiles pourront avoir lieu »

    Ces dispositions ont été précisées par le décret du 16 mars 1906 [1]  :

    - Article 50 : « L'arrêté pris dans chaque commune par le maire à l'effet de régler l'usage des cloches tant pour les sonneries civiles que pour les sonneries religieuses est communiqué au président ou directeur de l'association cultuelle.

    Un délai de quinze jours est laissé à celui-ci pour former à la mairie, s'il y a lieu, une opposition écrite et motivée, dont il lui est délivré récépissé.

    A l'expiration dudit délai, l'arrêté du maire est exécutoire dans les conditions prévues par l’article (L.2122-29 du code général des collectivités territoriales - CGCT) ».

    - Article 51 : « Les cloches des édifices servant à l'exercice public du culte peuvent être employées aux sonneries civiles dans les cas de péril commun qui exigent un prompt secours.

    Si elles sont placées dans un édifice appartenant à l'Etat, au département ou à la commune ou attribué à l'association cultuelle (…), elles peuvent, en outre, être utilisées dans les circonstances où cet emploi est prescrit par les dispositions des lois ou règlements, ou autorisé par les usages locaux ».

    Les sonneries religieuses sont celles afférentes à une cérémonie religieuse (ex. : mariage, messe) ou correspondant à des usages religieux (ex. : angélus).

    Les cloches des églises peuvent être utilisées pour des sonneries civiles (article 51) :

    - soit en cas de péril (incendies, émeutes...) ;

    - soit dans les circonstances où cet emploi est prescrit par les dispositions des lois ou règlements, ou autorisé par les usages locaux (ex. : sonnerie qui marque les heures de la journée).

    En outre, l'emploi des cloches d'un édifice cultuel à des fins civiles est légal lorsque les sonneries sont autorisées par les usages locaux.

    C’est la jurisprudence qui a dégagé les critères permettant de reconnaître l’existence d’un usage local :

    - la continuité dans le temps : « l'usage local s'entend de la pratique régulière et suffisamment durable de telles sonneries civiles dans la commune, à la condition que cette pratique n'ait pas été interrompue dans des conditions telles qu'il y ait lieu de la regarder comme abandonnée » (CAA Paris, 13 décembre 2016, n° 15PA03983) ;

    - l’assentiment des acteurs de la vie locale : le maire, les habitants et l’association cultuelle.

    Les sonneries de cloches, qu’elles soient religieuses ou civiles, sont donc réglées par arrêté municipal ou, en cas de désaccord entre les responsables religieux (curé affectataire) et le maire, par arrêté préfectoral.

    S’il appartient au maire de réglementer l'usage des cloches des églises dans l'intérêt de l'ordre et de la tranquillité publique (article L.2212-2 du CGCT), il est néanmoins tenu de concilier l'exercice de ce pouvoir avec le respect de la liberté des cultes (CE, 8 juillet 1910, n° 36120) et les usages locaux.

    Ainsi, le maire ne pourrait édicter une mesure qui aurait pour conséquence de supprimer les sonneries des offices et exercices religieux (CE, 5 août 1908, n° 28275) ou interdire de manière générale et permanente les sonneries en volée.

    En revanche, il doit, sous peine de voir sa responsabilité et celle de la commune engagée, prendre les mesures nécessaires pour assurer la tranquillité publique de la commune (CAA Nancy, 8 mars 2001, n° 97NC00911).

    Le juge paraît faire preuve de tolérance à l’égard des sonneries en période diurne.

    Il a notamment considéré qu’ « il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du rapport d'expertise, que les cloches de l'église (…), qui sonnent les heures et les demi-heures de 7h à 19h ainsi que l'angélus et la sonnerie de midi, ce qui représente des sonneries d'une durée totale de dix minutes par jour, portent atteinte, par leur fréquence et leur intensité, à la tranquillité publique des habitants du village, alors même que l'émergence sonore en résultant excède les limites définies par les dispositions (…) du code de la santé publique » (CAA Nantes, 21 février 2014, n° 12NT00123).

    De même, il a estimé que le régime diurne des sonneries civiles de la cloche de l'église de la commune ne portait pas atteinte, par sa fréquence et son intensité (deux fois par heure et tous les quarts d'heure) à la tranquillité publique des habitants du village, alors même que l'émergence sonore en résultant excède les limites définies par le code de la santé publique (CAA Nancy, 5 décembre 2011, n° 10NC01532).

    En revanche, la jurisprudence est assez favorable aux restrictions des sonneries de cloches la nuit. 

    Il a ainsi été jugé que :

    - « la sonnerie de l'angélus à 6 h, soit en période nocturne au sens des dispositions (…) du code de la santé publique est, par son niveau sonore et sa durée, constitutive d'une nuisance de nature à troubler la tranquillité du voisinage en période nocturne [et qu’] en s'abstenant de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux nuisances causées par cette sonnerie qui dépassait les valeurs limites de l'émergence en période nocturne, le maire a méconnu l'étendue de ses pouvoirs de police » (CAA Nancy, 23 juillet 2020, n° 19NC00432) 

    - « compte tenu de leur intensité et de leur fréquence, les sonneries horaires et demi-horaires, en période nocturne de 22 h à 7 h, sont de nature à porter atteinte à la tranquillité publique. Il en va de même, à plus forte raison, compte tenu de sa durée et de son intensité aggravée par l'usage de la volée de cloche [de 220 coups qui sonne l'angélus pendant plus de 3 minutes] à 6h03 » (CAA Nancy, 17 mai 2018, nos 17NC00829 et 17NC00838 : dans cette affaire, les bruits de cloches présentaient une émergence globale très nettement supérieure aux valeurs fixées par le code de la santé publique).

    - en ce qui concerne la période comprise entre 20h et 8h, durant laquelle la cloche retentissait toutes les heures, les sonneries constituaient une source de nuisance sonore, du fait du « caractère excessif du bruit produit par les sonneries en cause », et que le maire était tenu d’intervenir pour faire cesser ce trouble (arrêt de la CAA Nancy n° 10NC01532 précité) ;

    - le maire devait interrompre les sonneries civiles de la cloche de l'église de la commune de 19h30 à 7h30 (CAA Nantes, 6 mai 2005, n° 03NT01770 : dans cette affaire, la cloche retentissait à 400 reprises lors de cette plage horaire).

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    [1] Décret portant règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat en ce qui concerne l'attribution des biens, les édifices des cultes, les associations cultuelles, la police des cultes.



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    Paru dans :

    Info-lettre n°334

    Date :

    1 août 2023

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