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    Une commune peut-elle mettre en place une tarification différenciée pour les adultes fréquentant la cantine scolaire ?

    La restauration scolaire dans l’enseignement primaire est un service public facultatif des communes, annexe au service public national de l’enseignement (Conseil d’Etat, 5 octobre 1984, préfet de l’Ariège) dont le mode de gestion est déterminé librement par la collectivité qui en a la responsabilité. Le conseil municipal est seul compétent pour édicter, par une délibération, le règlement intérieur de la cantine qui constitue un acte administratif susceptible de recours.

    Cela étant posé, cette Fiche technique répond aux questions suivantes :

    Est-il possible de rompre le principe de l’égalité devant le service public en instaurant des tarifs différents en fonction de la qualité des usagers (agents communaux, animateurs ALAE notamment) ou du mode de facturation des repas servis ? Selon quelles modalités, la commune peut-elle participer financièrement aux dépenses supportées par les agents communaux ?

    1. La fixation des tarifs de la restauration relève de la compétence exclusive du bloc communal
    2. Le respect du principe d’égalité devant le service public
      1. L’égalité d’accès des usagers au service public
      2. Le cas des agents communaux
    3. Le service public entrant dans le champ concurrentiel
      1. Le respect du droit de la concurrence
      2. L’activité entrant dans le champ d’application de la TVA
    4. La facturation des repas des employés d’un prestataire assurant le service ALAE (Accueil de loisirs associé à l’école)
    5. L’action sociale en faveur des agents communaux

    La fixation des tarifs de la restauration relève de la compétence exclusive du bloc communal

    La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est venue supprimer le régime de règlementation des tarifs de restauration scolaire.

    Ainsi, si la compétence « restauration scolaire » est assumée par une commune, le conseil municipal est seul compétent pour fixer les tarifs de la cantine, même si une caisse des écoles s'en est vu confier la gestion (Conseil d'État, décision n° 359931, 11 juin 2014).

    La jurisprudence du Conseil d’Etat a été reprise et codifiée dans le Code de l’éducation qui dispose, dans son article R.531-52, que « les tarifs de la restauration scolaire fournie aux élèves des écoles maternelles, des écoles élémentaires, des collèges et des lycées de l'enseignement public sont fixés par la collectivité territoriale qui en a la charge ».

    Le respect du principe d’égalité devant le service public

    L’égalité d’accès des usagers au service public

    Le principe d’égalité devant le service public reconnu par la Constitution suppose que les usagers se trouvant dans une situation identique à l’égard d’un service rendu soient soumis à un même tarif. Pour le juge administratif, « la fixation de tarifs différents applicables, pour un même service rendu, à diverses catégories d'usagers d'un service ou d'un ouvrage public implique, à moins qu'elle ne soit la conséquence nécessaire d'une loi, soit qu'il existe entre les usagers des différences de situation appréciables, soit qu'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service ou de l'ouvrage commande cette mesure » (CE, 10 mai 1974, n° 88032, Denoyez et Chorques).

    Ainsi, toutes les personnes placées dans une situation identique à l’égard du service rendu doivent être régies par les mêmes règles. L’égalité des usagers se traduit par l’obligation d’une égalité de traitement. La collectivité territoriale peut donc appliquer un tarif unique pour toutes les catégories d’usagers sans distinction. Elle n’est pas contrainte de traiter différemment des situations différentes (CE, Ass., 28 mars 1997, Sté Baxter, n°179049).

    Si des différences sont possibles, elles doivent être justifiées par des critères objectifs, à savoir :

    • Une différenciation autorisée par la loi ;
    • Un intérêt général ;
    • Une différence de situation objectivement appréciable entre les usagers.

    L’activité principale de la cantine scolaire est la restauration des élèves. Même si les adultes sont autorisés par le règlement intérieur à bénéficier de ce service public, rien ne justifie, au regard de la situation objectivement appréciable entre les usagers, une différenciation des tarifs entre différentes catégories d’adultes.

    Le cas des agents communaux

    Il a notamment été jugé, sur le fondement de ces critères, que l’application d’un tarif préférentiel aux agents communaux pour l’accès à un service de crèche a été déclarée illégale, le juge ayant considéré qu’il n’existait pas une différence de situation appréciable entre lesdits agents et les autres usagers du service et que ce tarif préférentiel n’était pas justifié par une nécessité d’intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service (Tribunal Administratif de Marseille, 15 février 1991, Commune de Marseille). En l’espèce, au nom du principe d’égalité, le juge a considéré que les agents de la ville de Marseille ne sont pas, au regard du principe d’égalité, dans une situation qui diffère de celle des autres usagers vis-à-vis le service public conduisant à l’annulation du barème des tarifs d’accès aux crèches d’une commune.

    Cette solution a été rappelée par le juge administratif, qui considère qu’il n’existe aucune nécessité d’intérêt général, ni aucune différence de situation justifiant qu’un traitement particulier soit accordé aux agents de la collectivité par rapport aux autres usagers. Dans cette affaire, la cour rejette ainsi l’appel formé par une commune à l’encontre du jugement ayant annulé la délibération fixant le barème de la participation financière des familles aux prestations proposées par la caisse des écoles (CAA de Paris, 2 juillet 2010, n°09PA00974).

    Le service public entrant dans le champ concurrentiel

    Le respect du droit de la concurrence

    Lorsqu’une collectivité autorise les adultes, autres que les agents de la commune, à fréquenter son service de restauration, le service de cantine scolaire entre dans la sphère marchande.

    L’arrêt du Conseil d'Etat, Ass., 31 Mai 2006 - n° 275531 précise que lorsque les personnes publiques entendent prendre en charge une activité économique, elles ne peuvent légalement le faire que dans le respect tant de la liberté du commerce et de l'industrie que du droit de la concurrence. A cet égard, pour intervenir sur un marché, elles doivent, non seulement agir dans la limite de leurs compétences, mais également justifier d'un intérêt public, lequel peut résulter notamment de la carence de l'initiative privée. Une fois admise dans son principe, une telle intervention ne doit pas se réaliser suivant des modalités telles qu'en raison de la situation particulière dans laquelle se trouverait cette personne publique par rapport aux autres opérateurs agissant sur le même marché, elle fausserait le libre jeu de la concurrence sur celui-ci.

    La collectivité doit veiller à ce que le tarif du service ne constitue pas un abus de position dominante. Le service public entrant dans le champ concurrentiel doit respecter le droit de la concurrence.

    Ainsi, le tarif ne pouvant pas dépasser le coût du service, il doit correspondre exactement au prix de revient car la commune ne peut pas dégager de profit de son exploitation.

    L’activité entrant dans le champ d’application de la TVA

    L’activité principale du service de restauration scolaire doit être destinée aux enfants. L’offre de repas aux adultes devra donc n’être qu’accessoire. L’activité de restauration devra être segmentée comptablement, avec assujettissement à la TVA pour les prestations destinées aux autres publics.

    Selon l’article 256 du CGI (Code général des impôts), les recettes provenant de la fourniture des repas au personnel par les organismes gestionnaires des cantines sont soumises de plein droit à la TVA.

    En vertu des dispositions de l’article 261, 4, 4°, a du CGI, les cantines scolaires et universitaires exploitées en régie directe sont exonérées de TVA (BOI-TVA-CHAMP-30-10-20-50, 16 oct. 2019, § 50). En effet, leurs prestations sont considérées comme étroitement liées à l'activité d'enseignement exonérée.

    La collectivité ne peut en contrepartie effectuer aucun droit à déduction.

    Pour bénéficier de l’exonération, les repas doivent être exclusivement servis aux élèves et personnels de l'établissement (enseignants, personnel d'encadrement, d'entretien et de surveillance et personnel médical de garde dans les locaux).

    Dans l'hypothèse d'une imposition à la TVA, la collectivité exploitante peut bénéficier de la franchise en base de TVA prévue à l’article 293 B du CGI, si les recettes générées par l'activité ne dépassent pas un certain seuil, notamment :

    • 91 900 € l’année civile précédente ;
    • Ou 101 000 € l’année civile précédente, lorsque le chiffre d’affaires de la pénultième année n’a pas excédé le montant mentionné ci-dessus.

    La facturation des repas des employés d’un prestataire assurant le service ALAE (Accueil de loisirs associé à l’école)

    Etant donné qu’un tarif unique pour les adultes peut être instauré pour bénéficier de repas de la cantine scolaire, aucune différenciation de tarification ne peut être pratiquée à l’encontre des animateurs d’ALAE. La commune devra facturer les repas au prestataire assurant le service ALAE (une association par exemple) au tarif unique adulte. 

    L’action sociale en faveur des agents communaux

    S’il est interdit d’instituer un tarif avantageux pour les agents de sa collectivité, il est néanmoins possible de participer financièrement aux dépenses qu’ils supportent.

    L’action sociale en faveur du personnel de la collectivité est reconnue comme une obligation légale depuis la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale et constitue des dépenses obligatoires des communes et EPCI visées à l’article L.2321-2 du code général des collectivités territoriales. Cela a été transposé dans le nouveau code général de la fonction publique aux articles L.731-1 et suivants.

    Les modalités et montants de cette participation allouée sont déterminées par l’organe délibérant de la collectivité au nom du principe de libre administration, avec la consultation préalable du personnel et des instances de représentation. Toutefois, la participation de l’employeur devra, sauf exception, tenir compte de critères de revenus ou de situation familiale des bénéficiaires (article L.731-3 du code général de la fonction publique).

    Le bénéfice de ces prestations est indépendant du traitement indiciaire et du régime indemnitaire.

    Cette participation peut prendre diverses formes, par exemple : chèque emploi-service universel, titres-restaurants, chèques-vacances (L.732-1 et suivants du code général de la fonction publique).

    Enfin, les collectivités peuvent participer au prix des repas servis dans les restaurants administratifs et inter-administratifs. Lorsqu'il n'existe pas de restaurant de l'Administration à proximité, elles sont autorisées à signer des conventions avec les gestionnaires de restaurants du secteur privé, restaurants d'entreprise, voire restaurants d'entreprise du secteur nationalisé.



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°336

    Date :

    1 février 2024

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