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    Le nouveau CCAG maitrise d’œuvre

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    Deux ans après l'entrée en vigueur, le 1er avril 2019 du code de la commande publique (CCP), le Gouvernement vient de publier, 1er avril 2021, les nouveaux cahiers des clauses administratives générales (CCAG).

    Prévus à l'article R.2112-2 du CCP, les CCAG sont des documents généraux bien connus des acheteurs publics, auxquels ils peuvent se référer pour fixer les stipulations de nature administrative et financière. 

    Outre l’actualisation des cinq traditionnels CCAG, relatifs aux travaux, aux fournitures courantes et services (FCS), aux prestations intellectuelles (PI), aux technologies de l’informatique et de la communication (TIC) et aux marchés industriels (MI), un nouveau CCAG a été publié, relatifs aux marchés de maîtrise d’œuvre (MOE).

    La présente fiche a pour objet de présenter ce nouveau CCAG-MOE en abordant d’une part les clauses communes avec les autres CCAG et d’autre part, celles qui lui sont propres.

    1. Les clauses communes avec les autres CCAG
    2. Les clauses propres au CCAG-MOE
    3. Entrée en vigueur

    Les clauses communes avec les autres CCAG

     

    Une harmonisation et une actualisation terminologiques

    Outre leurs nombreuses références au Code des marchés publics, les CCAG n'avaient pas connu de profondes modifications depuis 2009, au contraire du droit de la commande publique. La sémantique des CCAG recoupait des termes devenus obsolètes. La terminologie a été harmonisée afin que les termes similaires et présents dans différents CCAG désignent et recoupent une même notion (comme par exemple les notions d'« admission » ou encore de « mémoire en réclamation »).

    Les termes « pouvoir adjudicateur » et « entité adjudicatrice » ont été remplacés par celui d'« acheteur » (exception faite des CCAG travaux et maîtrise d'œuvre où le terme « pouvoir adjudicateur » est remplacé par « maître d'ouvrage»), les « marchés à bons de commande » ont été remplacés par les « accords-cadres à bons de commande », les « tranches conditionnelles » par « tranches optionnelles » et la « cotraitance » par « groupements d'opérateurs économiques ».

    Des ambiguïtés sémantiques ont également été levées concernant notamment la notion de « réception » dorénavant utilisée dans les seuls CCAG travaux et MOE (où la réception peut être assortie de réserves). Participe également de cet effort de rigueur le retrait du CCAG-FCS de toute référence à la notion de « réserve », juridiquement liée aux opérations de travaux.

    La protection des données personnelles

    Comme les cinq autres CCAG, le CCAG-MOE intègre, dans son article 5.2, les exigences portées par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel (RGPD). Ce RGPD est applicable aux contrats de la commande publique dès lors qu'ils comprennent une prestation mettant en œuvre un traitement de données à caractère personnel. Concrètement, un accord doit être annexé aux documents contractuels décrivant le traitement attendu et comportant un certain nombre de mentions nécessaires.

    La prise en compte des nouvelles obligations de dématérialisation

    La dématérialisation, obligatoire pour les procédures de passation des marchés depuis le 1er octobre 2018, est mentionnée en deux temps dans les CCAG en vue de l'exécution des marchés : une référence aux profils d'acheteur et à tout autre moyen de communication électronique est introduite pour encadrer les notifications d'informations (art. 2 du CCAG-MOE) et, à titre pédagogique, des stipulations viennent rappeler la réglementation relative à la facturation électronique (art. 11.10 du CCAG-MOE) et précisent que « la demande de paiement peut être refusée par l'acheteur lorsque celle-ci méconnait les obligations de dématérialisation des factures à la charge du titulaire et de ses sous-traitants admis au paiement direct ».

    La prise en compte des objectifs de développement durable

    Dans le prolongement des dispositions de l'article L.2111-1 du CCP qui imposent aux acheteurs de prendre en compte « des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale » au stade de la détermination de la nature et de l'étendue des besoins à satisfaire, les nouveaux CCAG comportent des articles relatifs au développement durable. Ils détaillent ainsi (article 18.1 du CCAG-MOE) les caractéristiques minimales qu’une clause d’insertion sociale doit respecter dans le cas où les documents particuliers du marché en prévoient une et imposent le principe d’une clause environnementale (art. 18.2 du CCAG-MOE) dont ils définissent aussi les conditions.

    Leur exécution devra être contrôlée, et les manquements sanctionnés par des pénalités à prévoir. Le CCAG-MOE confie en outre au maître d’œuvre la responsabilité de la valorisation ou l'élimination des déchets créés lors de l’exécution des prestations pendant la durée du marché (article 18.2.3).

     

    Le rééquilibrage des relations contractuelles

    L'actualisation des CCAG est également caractérisée par un certain rééquilibrage des relations contractuelles, au profit du titulaire, dans les domaines ci-après.

    La simplification du régime des avances

    Les CCAG (art. 11.1 du CCAG-MOE) prévoient désormais un système d'options alternatives A et B pour fixer le montant de l'avance lorsque le versement est obligatoire, dans les conditions définies à l’article R.2193-3 du CCP :

    - L’option A prévoit l'application d'un taux d'avance de 20 % pour les PME et d'un taux correspondant au minimum réglementaire pour les autres entreprises (soit 5 % du montant du marché), ou d'un taux supérieur fixé dans les documents particuliers du marché ;

    - l'option B prévoit l'application des taux d'avances minimums fixés par le CCP, ou des taux supérieurs fixés par les documents particuliers du marché.

    La différence fondamentale entre les deux options est qu’il n’y a pas de taux particulier pour les PME dans l’option B. Enfin, si les documents particuliers du marché ne mentionnent rien, c'est l'option A qui s'applique par défaut.

    La révision des systèmes de pénalités et de primes

    Les mécanismes de pénalités de retard (art. 16 du CCAG-MOE) et de primes (art. 17 du CCAG-MOE) ont également été revus et harmonisés.

    S'agissant des pénalités, outre un plafonnement à 10 % du montant du marché, de la tranche considérée ou du bon de commande, un seuil en deçà duquel le titulaire est exonéré du paiement des pénalités est fixé à 1 000 € dans tous les CCAG. Une procédure contradictoire est également instituée avant que des pénalités de retard puissent être infligées au titulaire (article 16.2.4 du CCAG-MOE)

    S’agissant des primes, la clause ne peut pas se suffire à elle-même : elle renvoie aux documents particuliers pour en fixer les conditions d'attribution, les modalités de calcul et de versement.

    La prise en compte des effets de la crise sanitaire

    L'actualisation des CCAG a enfin été l'occasion de tirer les enseignements de la crise sanitaire et de ses effets sur l'exécution des marchés publics, dans le prolongement de l'article 132 de la loi ASAP codifié aux articles L.2711-1 à L.2711-8 du code de la commande publique, relatifs aux circonstances exceptionnelles.

    Ainsi, lorsque la poursuite de l'exécution du marché est rendue temporairement impossible du fait de circonstances imprévisibles, la suspension de tout ou partie des prestations peut être prononcée par l'acheteur public (art. 25 du CCAG-MOE). La suspension peut également être demandée par le titulaire. Dans cette hypothèse, l'acheteur se prononce alors sur le bien-fondé de cette demande. Sont également précisées les conditions dans lesquelles les parties doivent se rapprocher pour convenir des décisions à prendre durant la suspension de l'exécution du marché et pour s'accorder sur les modalités de répartition des surcoûts. À défaut d'accord entre les parties, le titulaire est tenu, à l'issue de la suspension, de reprendre l'exécution des prestations.

    Il est également prévu une clause de réexamen (art. 26 du CCAG-MOE) applicable en présence de circonstances imprévisibles venant affecter les conditions d'exécution du marché sans pour autant faire obstacle à la poursuite des prestations, afin que les parties examinent les conséquences, notamment financières de ces circonstances.

    Prestations supplémentaires ou modificatives

    Les nouveaux CCAG (art. 14 du CCAG-MOE) prévoient que les prestations supplémentaires ou modificatives ayant une incidence financière inférieure à un certain seuil (10% pour les marchés de MOE), au-dessus duquel, elles doivent donner lieu à un avenant, sont demandées par l’acheteur au moyen d’un ordre de service mentionnant provisoirement les prix nouveaux retenus, après consultation du titulaire. Ces prix provisoires décidés par l’acheteur sont alors utilisés pour le règlement des acomptes dans l’attente de la fixation des prix définitifs. Ils prévoient en outre qu’en l’absence de valorisation d’un ordre de service prescrivant des prestations supplémentaires ou modificatives, le titulaire peut refuser d’exécuter l’ordre de service concerné.

    Les clauses propres au CCAG-MOE

     

    L’introduction des définitions spécifiques aux marchés de maîtrise d’œuvre

    À l’article 2 du document, les termes spécifiques relatifs aux marchés de maîtrise d’œuvre, découlant de l’ancienne loi n° 85-705 du 12 juillet 1985 dite MOP, aujourd’hui abrogée et codifiée dans le code de la commande publique, sont précisément définis.

    Tels sont notamment les cas des notions de « maître d’ouvrage », « maître d’œuvre », « réception des travaux » et de « programme de l’opération ».

    Sont également définis à cet article les notions de « BIM », de cahier des charges « BIM » et de « convention BIM ».

    Le BIM (« Building Information Modeling » ou « Modélisation d'informations de la construction ») est une méthode de travail facultative basée sur la collaboration autour d'une maquette numérique. Dans un processus BIM, chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir au final à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement.

    Les engagements du maître d’œuvre sur le coût prévisionnel des travaux

    L’article 13.2 prévoit les engagements du maître d’œuvre sur le coût des travaux.

    Ces engagements sont affectés d’un seuil de tolérance, qui s’appliquent à défaut de mention différente dans les documents particuliers du marché.

    Le passage du forfait provisoire eu forfait définitif de rémunération

    Selon l’article 10.2.1, lorsque le marché est passé à prix provisoires, ce qui est généralement le cas, les modalités de fixation du prix définitif sont définies dans les documents particuliers du marché.

    Dans ce cadre, le passage à la rémunération définitive s'opère par une clause de réexamen en application de l'article R.2194-1 du code de la commande publique.

    Le renforcement de l’efficacité de l’exécution financière du marché de maîtrise d’œuvre

    Outre les règles communes avec les autres CCAG, de facturation électronique par le biais de l’application http://chorus-pro.gouv.fr, l’article 11.10.2 dispose que le maître d’œuvre est lui-même habilité à recevoir des demandes de paiement des entrepreneurs de travaux par le biais de la même application. Les modalités pratiques d’habilitation du maître d’œuvre pour y accéder doivent être prévues dans les documents particuliers du marché. Il est à signaler que chorus-pro bénéficie depuis le début d’année d’une nouvelle fonctionnalité, permettant aux maîtres d’œuvres de gérer pour la collectivité maître de l’ouvrage les factures des entrepreneurs de travaux. L’opération consiste en un simple paramétrage par la collectivité, du maître d’œuvre, en insérant le numéro SIRET de ce dernier (voir https://communaute.chorus-pro.gouv.fr/comment-parametrer-le-maitre-d-oeuvre-public-dans-chorus-pro/).  Est ainsi évacué tout risque d’interruption de la chaîne de dématérialisation dans le processus de paiement des marchés de travaux.

    S’agissant du paiement du solde du marché de maîtrise d’œuvre, le CCAG (article 11.8) organise un système de décompte général, à l’instar de ce qui existe dans le CCAG travaux. Est prévue notamment une règle d’acceptation tacite du décompte faute pour l’une ou l’autre partie d’accomplir les formalités qui lui incombent dans les délais contractuels.

    Un régime spécifique de propriété intellectuelle

    Antérieurement, le CCAG-PI de 2009, généralement utilisé pour les marchés de maîtrise d’œuvre, proposait deux options pour le régime des droits de propriété intellectuelle :

    - L’option A, qui concédait à l’acheteur le droit d’utiliser les résultats, de procéder à des modifications, sans exploitation commerciale possible, et ce dans le cadre strict des besoins de l’acheteur découlant de l’objet du marché ;

    - L’option B, qui cédait à titre exclusif les résultats à l’acheteur qui disposait donc du droit de les utiliser, de les modifier, et d’en faire une exploitation commerciale.

    Le nouveau CCAG (art. 24) prévoit désormais une seule option, correspondant à l’ancienne option A et donc à la concession des droits à titre non exclusif (à l’opposé des autres CCAG qui prévoient également désormais une seule option, mais correspondant à une cession, également à titre non exclusif). La nouvelle clause est autosuffisante, c'est-à-dire qu’elle n’implique pas de la préciser dans les documents particuliers du marché, car adaptée spécifiquement aux marchés de maîtrise d’œuvre.

    Autres stipulations

    L’obligation pour la collectivité maître de l’ouvrage d’indiquer les assurances qu’elle a contractées pour l’exécution du marché

    Alors que l’article 9.1 liste les assurances obligatoires que doit contracter le maître d’œuvre pour l’exécution du marché (responsabilité civile professionnelle et décennale), l’article 9.2 oblige la collectivité maître de l’ouvrage à préciser elle-même, dans les documents particuliers du marché, les assurances obligatoires et facultatives qu’elle a souscrites (Tous risques chantiers, Dommages-ouvrages, Responsabilité etc.).

    L’instauration de prix révisables

    L’article 10.1.1 stipule que les prix sont révisables, dès lors que la durée du marché excède trois mois. Le texte donne même une formule de révision applicable par défaut, reposant sur l’index ING.

    Lorsque les prix sont fermes, ils sont actualisables, selon des modalités également détaillées, avec une formule d’actualisation reposant aussi sur l’index ING.

    La suppression des parties techniques

    L’article 20 du CCAG-PI de 2009 permettait de scinder l’exécution du marché en plusieurs parties techniques, ce qui permettait de mettre fin à l’exécution des prestations, et donc du marché, à l’issue de chacune d’entre elles. Cette stipulation a été supprimée dans le nouveau CCAG.

    Entrée en vigueur

    Les nouveaux CCAG sont entrés en vigueur, de façon simultanée, le 1er avril 2021. Toutefois, les CCAG dans leur version de 2009 peuvent continuer à être utilisés par les acheteurs jusqu’au 30 septembre 2021. Pendant cette période transitoire, en l’absence de précision expresse dans les documents particuliers du marché sur la version à laquelle le marché fait référence, l’ancienne version de 2009 s’applique par défaut.

    Afin de faciliter la transition, une table de correspondance entre les articles des anciens et des nouveaux CCAG a par ailleurs été mise en ligne par le Ministère de l’Économie.

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    Pour aller plus loin :

    Tableau récapitulatif des principales stipulations du CCAG-MOE. 

     

    Principales stipulations

     

    Articles concernés du CCAG-MOE

    I/ Les clauses communes avec les autres CCAG

    Protection des données personnelles (RGPD)

    5.2

    Nouvelles obligations de dématérialisation

    2 et 11.10

    Objectifs de développement durable

    18.1 et 18.2

    Simplification du régime des avances

    11.1

    Révision des systèmes de pénalités et de primes

    16 et 17

    Prise en compte de la crise sanitaire (systèmes de suspension provisoire de l’exécution des prestations et clause de réexamen)

    25 et 26

    Règlement des prestations supplémentaires

    14

    II/ Les clauses propres au CCAG-MOE

    Introduction des définitions spécifiques aux marchés de maîtrise d’œuvre : programme des travaux, maître d’ouvrage, maître d’œuvre, réception des travaux, cahier des charges BIM

    2

    Engagement du maître d’œuvre sur le coût des travaux

    13.2

    Modalités de fixation du prix définitif en cas de prix provisoire

    10.2.1

    Gestion des factures des entrepreneurs de travaux par http://chorus-pro.gouv.fr

    11.10.2

    Système de décompte général

     

    11.8

    Régime spécifique de propriété intellectuelle

     

    24

    Obligation pour la collectivité maître de l’ouvrage d’indiquer les assurances obligatoires et facultatives contractées pour l’exécution du marché

     

    9.2

    Instauration de prix révisables

     

    10.1.1

    Suppression des parties techniques

     

    Sans objet

    III/ Entrée en vigueur des nouveaux CCAG

     

    Les nouveaux CCAG sont entrés en vigueur, de façon simultanée, le 1er avril 2021. Toutefois, les CCAG dans leur version de 2009 peuvent continuer à être utilisés par les acheteurs jusqu’au 30 septembre 2021. Pendant cette période transitoire, en l’absence de précision expresse dans les documents particuliers du marché sur la version à laquelle le marché fait référence, l’ancienne version de 2009 s’applique par défaut.

     



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°307

    Date :

    1 mai 2021

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