de liens

    Aller sur la page Recherche documentaire

    Thèmes

    de liens

    La réforme du droit des marchés publics

    A l'occasion de la transposition en droit français des directives marchés publics (2014/24/UE et 2014/25/UE du 26 février 2014), le gouvernement, habilité à agir par voie d'ordonnance, a procédé à une réforme « pointilliste » : pas de révolution, si ce n'est peut-être dans la définition des marchés de travaux (voir ci-dessous), mais de nombreux ajouts et changements affectant les règles de passation mais aussi de préparation et de modification des marchés.

    Voici celles qui concerneront le plus directement les acheteurs publics locaux.

    Les nouveaux textes relatifs aux marchés publics

    ▪ Le droit des marchés publics n'a plus de code, tout au moins en attendant un code de la commande publique depuis longtemps annoncé et sans cesse repoussé.

    Deux textes sont à connaître désormais en matière de marchés publics: l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016.

    Des textes d’application sont également parus, dont l’arrêté du 29 mars 2016 fixant la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics (NOR: EINM1600215A), qui remplace l’arrêté du 28 août 2006.

    D'autres sont encore en préparation.

    ▪ Ces nouvelles règles sont entrées en vigueur depuis le 1er avril 2016 (art. 188 du décret).

    Elles s'appliquent aux marchés dont la passation a été lancée à compter de cette date: c'est la date d’envoi de l’avis de publicité à la publication, ou de l’engagement de la consultation en l’absence d’avis de publicité, qui est pris en compte pour déterminer le droit applicable.

    Le code des marchés publics, bien qu'abrogé depuis la même date, continue de s'appliquer, pour ce qui concerne les règles relatives à l'exécution des marchés, aux contrats en cours ou dont la passation a été engagée avant le 1er avril.

    Une réglementation unique pour les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices

    • Les collectivités locales passent généralement leurs marchés en tant que pouvoirs adjudicateurs.

    Néanmoins, lorsqu'elles agissent dans certains secteurs, essentiellement des activités de réseaux (eau, transports, énergie), elles commandent en tant qu'entités adjudicatrices.

    • Auparavant, chaque catégorie d’acheteur était soumise à une partie distincte du code des marchés publics.

    A présent, c'est un même corps de règles qui s'applique aux acheteurs publics, quelle que soit la qualité sous laquelle ils concluent leurs marchés.

    Seules certaines spécificités mineures demeurent pour les entités adjudicatrices (ex. : à la différence des pouvoirs adjudicateurs, elles ne sont pas tenues à l’établissement d’un rapport détaillé de présentation de la procédure de passation pour chaque marché de seuil européen et doivent seulement conserver certaines informations relatives à la procédure menée – art. 105 et 106 du décret).

    La disparition de la notion de maîtrise d'ouvrage publique dans la définition des marchés de travaux

    ▪ Le nouveau droit des marchés publics procède à un alignement total de la définition française des marchés de travaux sur la définition européenne.

    Aux termes de l'article 5 I de l'ordonnance, « Les marchés publics de travaux ont pour objet :
    (…) 2° Soit la réalisation, soit la conception et la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d'un ouvrage répondant aux exigences fixées par l'acheteur qui exerce une influence déterminante sur sa nature ou sa conception
     ».

    C'est l'introduction de l'expression « par quelque moyen que ce soit », et la disparition corrélative de toute référence à la maîtrise d'ouvrage publique, qui change tout : désormais, la qualité du maître d’ouvrage des travaux est indifférente.

    ▪ Les conséquences sont importantes car se retrouvent ainsi soumis aux règles de passation des marchés publics des contrats qui y échappaient auparavant, tout au moins en-dessous du seuil européen (5 225 000 € HT) : ceux par lesquels une personne publique confiait l’exécution de travaux à son cocontractant qui en assumait seul la maîtrise d’ouvrage.

    Tel était, par exemple, le cas du bail emphytéotique administratif (BEA) dit « aller-retour », dans le cadre duquel une personne publique autorisait un investisseur à occuper son domaine pour y édifier un bâtiment, lequel lui était immédiatement loué.

    Encore faudra-t-il certes que l'ouvrage qui fait l'objet du contrat réponde aux exigences de la collectivité et que celle-ci ait exercé « une influence déterminante sur sa nature ou sa conception », mais il n'en reste pas moins que la sphère des marchés publics de travaux se trouve considérablement élargie.

    Les marchés publics exclus du champ d’application de la nouvelle règlementation

    Les exclusions en raison de l’objet du contrat

    Les cas d’exclusion prévus au code des marchés publics sont repris à l'article 14 de l’ordonnance.

    Demeurent donc exclus du champ d'application des marchés, les acquisitions et les locations de terrains ou de bâtiments existants, les contrats d’emprunt, ou encore les services d’authentification de documents assurés par les notaires. A noter néanmoins que les achats d’œuvres et d’objets d’art existants ne font plus partie de la liste de ces exclusions. Un marché négocié sans publicité ni mise en concurrence préalable pourra cependant être conclu pour l’acquisition – ou la création – d’une œuvre d’art unique (art. 30 I, 3° a).

    Les exclusions en raison des relations internes au secteur public

    Consécration et élargissement de la quasi-régie (art. 17 de l’ordonnance)

    ▪ La nouvelle réglementation reprend, en les précisant, les conditions de la quasi-régie, également appelée relation « in house », posées antérieurement par la jurisprudence (I de l’art. 17 préc. de l’ordonnance) :

    - l'exercice sur l'entité prestataire d'un contrôle analogue à celui que la collectivité exerce sur ses propres services, ce qui se traduit par une « influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de la personne morale contrôlée » ;

    - une activité de l'entité contrôlée essentiellement réalisée pour le pouvoir adjudicateur, avec un seuil fixé à plus de 80 % ;

    - enfin, l'absence au sein de l'entité contrôlée de capitaux privés.

    Concernant cette dernière condition toutefois, la formulation retenue pourrait permettre l’identification d’une relation de quasi-régie pour certaines sociétés d'économie mixte (SEM) dans leurs relations contractuelles avec les collectivités publiques qui en sont actionnaires, dans la mesure où ne sont pas retenues les « formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par la loi qui ne permettent pas d'exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée ». Cela reste néanmoins à confirmer par le juge.

    ▪ Est également consacrée la relation de quasi-régie en cas de contrôle conjoint (III de l’art. 17 préc. de l’ordonnance), qui concerne notamment les relations des communes avec l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dont elles sont membres.

    ▪ Enfin, la quasi-régie est élargie aux situations de contrôle « à deux degrés » : est ici visée l'attribution d’un marché par un pouvoir adjudicateur à une personne morale sur laquelle une autre personne morale exerce un contrôle analogue et qui est elle-même contrôlée par le pouvoir adjudicateur (dernière phrase du I de l’art 17 préc. de l’ordonnance).

    La consécration de la coopération entre personnes publiques (art. 18 de l’ordonnance)

    Autre hypothèse d'exclusion des règles de la commande publique par les textes : celle de la conclusion d’un contrat pour l’exercice en commun d’un service public.

    Déjà admise par la jurisprudence tant européenne (CJUE 9 juin 2009, aff. C-480/06, Commission c/ Allemagne) que française (CE 3 février 2012, Commune de Veyrier-du-Lac, Communauté d’agglomération d’Annecy, n° 353737), cette exclusion permet à deux collectivités de coopérer par voie contractuelle en vue d'accomplir une mission commune de service public sans tomber sous le coup de la commande publique.

    Le maintien des seuils de publicité et de mise en concurrence

    ▪ Les seuils de publicité et de mise en concurrence restent inchangés.

    Le seuil de 25 000 € HT, en-dessous duquel un marché peut être passé de gré à gré avec l’entreprise de son choix, est maintenu.

    Il en est de même pour celui de 90 000 € HT, à partir duquel la publication d'un avis de marché est obligatoire et qui déclenche l’obligation de dématérialisation, ainsi que pour les seuils des procédures formalisées : 209 000 € HT pour les fournitures et services et 5 225 000 € HT pour les travaux.

    ▪ La façon de calculer ces seuils n'est pas non plus bouleversée (art. 21 du décret): on raisonne toujours en termes d'opération pour ce qui est des travaux et en termes de besoins homogènes en fournitures et en services.

    Pour ces derniers, l'acheteur a toujours le choix entre deux méthodes alternatives: celle des caractéristiques propres (par familles de prestations), ou celle de l'unité fonctionnelle (par projet).

    La seule nouveauté réside dans les précisions apportées pour le calcul des seuils des besoins réguliers en fournitures et services.

    Ainsi, la valeur estimée des marchés publics de fournitures ou de services qui répondent à un besoin régulier est calculée sur la base (II de l’art. 21 préc. du décret) :

    « 1° Soit du montant hors taxes des prestations exécutées au cours des douze mois précédents ou de l’exercice budgétaire précédent, en tenant compte des évolutions du besoin susceptibles d’intervenir au cours des douze mois qui suivent la conclusion du marché public ;

    2° Soit de la valeur estimée des prestations qui seront exécutées au cours des douze mois ou de l’exercice budgétaire qui suit la conclusion du marché public. »

    Les nouvelles règles concernant la passation des marchés publics

    La reconnaissance de la possibilité de faire du « sourcing » ou « sourçage »

    ▪ Aux termes de l’art. 4 du décret :

    « Afin de préparer la passation d’un marché public, l’acheteur peut effectuer des consultations ou réaliser des études de marché, solliciter des avis ou informer les opérateurs économiques de son projet et de ses exigences.

    Les résultats de ces études et échanges préalables peuvent être utilisés par l’acheteur, à condition qu’ils n’aient pas pour effet de fausser la concurrence et n’entraînent pas une violation des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. »

    ▪ Si cette disposition autorise désormais officiellement la pratique courante du « sourçage », cette nouvelle liberté s'accompagne de l'obligation d’écarter les entreprises qui ont participé de manière directe ou indirecte à la préparation de la procédure de passation s’il n’y a pas moyen de rétablir l’égalité entre les candidats (art. 48 3° de l'ordonnance et 5 du décret).

    Certains spécialistes du droit des marchés publics annoncent déjà que cette reconnaissance du « sourçage » constituera sans aucun doute une nouvelle source importante de contentieux.

    Du nouveau en matière d’allotissement

    ▪ Le principe de l’allotissement est réaffirmé, avec les mêmes aménagements que ceux déjà prévus par le code des marchés publics, comme la faculté de ne pas allotir lorsque cela risquerait de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l'exécution des prestations (art. 32 de l’ordonnance).

    ▪ En revanche, une obligation nouvelle est celle de motiver dans les documents de la consultation la décision de ne pas allotir un marché (art. 12 du décret).

    ▪ Autre innovation : en cas d’allotissement, l'acheteur public pourra permettre aux candidats de présenter des offres variables en cas d’obtention de plusieurs lots (art. 32 préc. de l'ordonnance).

    Les procédures de passation

    ▪ Les nouveaux textes relatifs aux marchés publics distinguent trois grandes catégories de procédures (art. 42 de l’ordonnance).

    ▫ Les procédures formalisées tout d'abord, que sont (art. 25 I et 26 du décret) :

    - l’appel d’offres ;

    - la procédure concurrentielle avec négociation, qui remplace la procédure négociée avec publicité et mise en concurrence préalables, sauf en ce qui concerne les entités adjudicatrices pour lesquelles cette dernière demeure ;

    - et le dialogue compétitif.

    Les cas d’utilisation par les pouvoirs adjudicateurs de la procédure concurrentielle avec négociation et du dialogue compétitif sont limitativement énumérés à l’article 25 II du décret. Ne relevant pas de ces cas, l’achat de biens ou produits standards ne peut être effectué que selon la procédure d’appel d’offres.

    ▫ La procédure adaptée ensuite, qui peut être mise en œuvre pour :

    - les marchés inférieurs aux seuils des procédures formalisées (art. 27 du décret) ;

    - les marchés de services sociaux et autres services spécifiques (art. 28 du décret) ;

    - et les marchés de services juridiques de représentation (art. 29 du décret) : cela concerne les services de représentation en justice à l’occasion d’un contentieux, ainsi que les consultations liées à une telle mission de représentation.

    Il est ici à noter que les « petits » marchés, c'est-à-dire ceux inférieurs à 25 000 € HT, ne sont plus rangés parmi les procédures adaptées mais figurent désormais parmi les cas d’utilisation de la procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence préalables (art. 30 8° du décret).

    ▫ Outre ce cas, les marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence préalables concernent notamment (art. 30 du décret) : les marchés destinés à répondre à une urgence impérieuse, les prestations ne pouvant être fournies que par une seule entreprise, ou encore les marchés de services attribués au lauréat d’un concours.

    ▫ A titre de remarque, le concours (art. 8 de l’ordonnance), qui n'a pas été évoqué jusqu'à présent, ne constitue pas à proprement parler une procédure, mais seulement un mode de sélection d’un projet donnant ensuite lieu à une procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence préalables.

    ▪ Enfin, concernant les marchés spécifiques, il y a lieu de souligner qu'aucun changement n'est à relever concernant la passation des marchés de maîtrise d’œuvre (art. 90 du décret) : ils demeurent soumis en principe au concours, sauf cas dérogatoires comme en matière de réhabilitation ou d'opérations d'infrastructure.

    Plus de modèle obligatoire d’avis de publicité pour les marchés entre 90 000 € HT et les seuils européens

    ▪ Concernant les mesures de publicité des marchés, il faut signaler qu'il n'existe plus de modèle d’avis d'appel public à la concurrence obligatoire pour les marchés d'un montant compris entre 90 000 € HT et les seuils des procédures formalisées.

    Dans l'attente de précisions apportées par la jurisprudence sur le degré suffisant d'information des candidats dans le cadre de ces marchés, il est recommandé de continuer à faire figurer dans les avis, au minimum, les indications se rapportant aux rubriques indiquées comme obligatoires dans l’ancien formulaire officiel.

    ▪ Pour le reste, les règles de publicité sont inchangées, seules quelques précisions sont ajoutées.

    Par exemple, pour les marchés d'un montant estimé supérieur à 90 000 € HT et inférieur aux seuils des procédures formalisées, l'avis de marché peut être publié, outre au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ou dans un journal d'annonces légales, dans une publication spécialisée dans le secteur d'activité qui fait l'objet du marché, voire au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) si l'acheteur l'estime nécessaire.

    L’obligation de recevoir les candidatures et les offres dématérialisées pour tout marché

    Selon les dispositions de l’article 40 II du décret, les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements ne peuvent refuser de recevoir les candidatures et les offres transmises par voie électronique et ce sans considération de seuil de procédure.

    Le respect de cette exigence ne pose pas de problème lorsque l’acheteur public a recours à une plateforme de dématérialisation – un « profil d’acheteur » – pour la mise en ligne des documents de la consultation car celle-ci offre également la possibilité de recevoir les candidatures et les offres par voie dématérialisée. Cependant le recours à un profil d’acheteur n’est obligatoire que pour les marchés excédant le seuil de 90 000 € HT (il sera élargi à tous les marchés sans exception après le 1er octobre 2018) (article 39 IV du décret).

    En dessous de ce seuil, la possibilité qui doit être offerte aux opérateurs économiques de remettre, s’ils le souhaitent, leur candidature et leur offre par voie électronique, n’implique pas pour autant de recourir à une plateforme de dématérialisation. Selon la direction des affaires juridiques des ministères de l’Economie et des Finances questionnée à ce sujet, l’envoi des candidatures et des offres pourra s’opérer par simple courriel adressé directement à l’acheteur public. Il appartiendra aux candidats d’être précautionneux en demandant un accusé de réception électronique pour assurer la traçabilité de leur envoi. De leur coté, les acheteurs devront prendre les mesures nécessaires pour assurer l’intégrité et la confidentialité des courriels reçus ainsi que l’impose l’article 42 II du décret.

    Des interdictions de soumissionner obligatoires et d’autres facultatives

    ▪ Les interdictions de soumissionner que nous connaissions déjà sont reprises et qualifiées à présent d'obligatoires.

    A noter cependant qu'il est maintenant possible, certes de manière très restreinte, d'y déroger, « à condition que cela soit justifié par des raisons impérieuses d'intérêt général, que le marché public en cause ne puisse être confié qu'à ce seul opérateur économique et qu'un jugement définitif d'une juridiction d'un État membre de l'Union européenne n'exclut pas expressément l'opérateur concerné des marchés publics » (art. 47 de l’ordonnance).

    ▪ Vient s'ajouter une liste de cas d’interdictions de soumissionner dites facultatives (art. 48 de l’ordonnance).

    Tel sera le cas notamment des personnes qui ont participé de manière directe ou indirecte à la préparation de la procédure de passation du marché.

    Il faut cependant préciser que la portée de l'adjectif « facultatives » est encore incertaine : sont-ce des cas d'interdiction de soumissionner laissés à l'appréciation de l'acheteur, ou des interdictions qui s'appliquent dès lors que la situation qu'ils visent se présente?

    Les pièces demandées aux candidats

    ▪ Au stade de l’examen des candidatures, où l’acheteur s’assure des capacités des postulants au marché, il est à signaler qu'il est désormais possible de prendre en compte des références de plus de 3 ans, « afin de garantir un niveau de concurrence suffisant » (art. 3 I 2° de l’arrêté du 29 mars 2016 préc.).

    Cette faculté pourra notamment être utilisée pour la passation de marchés de maîtrise d'œuvre portant sur un type d'ouvrage pour lequel les candidats sont susceptibles de n'avoir  que peu de références et au surplus, des références espacées dans le temps (ex.: passerelles enjambant un cours d'eau).

    Pour avoir la garantie que les candidats possèdent les ressources humaines et techniques nécessaires pour exécuter les prestations en assurant un niveau de qualité approprié, l’acheteur peut imposer, dans les marchés de services ou de travaux et dans les marchés de fournitures nécessitant des travaux de pose ou d’installation ou comprenant des prestations de services, qu’ils indiquent les noms et les qualifications professionnelles pertinentes des personnes physiques qui seront chargées de l’exécution du marché en question (art. 44 IV du décret).

    ▪ En matière de remise des offres, un changement de pratique important et, il faut l'avouer un peu déroutant pour les acheteurs : désormais, l'acte d'engagement n'a pas à être signé au moment où l'offre est déposée, seul l'attributaire du marché aura à la signer à la fin de la procédure de passation.

    Autrement dit, la pièce comprenant les éléments les plus importants de l'offre, dont le prix, sera remise sans que la personne publique ne puisse savoir si elle l'a bien été par une personne habilitée à engager l'entreprise.

    N'y a-t-il pas là un risque de voir des entreprises qui ne seraient plus intéressées par l'obtention d'un marché se dédire si elles sont désignées attributaires?

    La consécration de la possibilité de se réserver la faculté de négocier en procédure adaptée

    Après moultes tergiversations de la jurisprudence, le Conseil d'État avait finalement tranché en faveur de la possibilité pour les acheteurs de se réserver la faculté de négocier en fonction des offres effectivement remises (CE 18 septembre 2015, Sté Axcess, n° 380821).

    La nouvelle réglementation des marchés consacre cette liberté.

    On peut seulement formuler un regret, celui que le ministère de l'Économie ait retenu une  formule quelque peu alambiquée (art. 27 al. 2 du décret) :

    « Lorsque l'acheteur a prévu de négocier, il peut attribuer le marché public sur la base des offres initiales sans négociation, à condition d'avoir indiqué dans les documents de la consultation qu'il se réserve la possibilité de le faire. »

    Des précisions sur l’obligation de vérification des offres anormalement basses

    La définition des offres anormalement basses (OAB) n'évolue pas, mais des précisions sont apportées à leur régime, notamment sur les justifications susceptibles d’être fournies par les candidats (art. 60 du décret).

    La vérification des OAB qui s’impose dans toutes les procédures de passation, s’étend à la part des prestations qui sont sous-traitées (art. 62 II de l’ordonnance et art. 60 I du décret). Ainsi, lorsque le montant de la sous-traitance apparaît anormalement bas, l’acheteur a l’obligation de mettre en œuvre la procédure contradictoire prévue à l’article 60 précité, afin de s’assurer de la viabilité de l’offre pour la partie sous-traitée du marché (art. 134, 1° du décret).

    Après vérification, si les justifications fournies par le candidat ne permettent pas d’établir que le montant des prestations sous-traitées n’est pas anormalement bas, l’acheteur doit rejeter l’offre.

    Lorsque la demande de sous-traitance est présentée par le titulaire en cours de marché, l’acheteur doit procéder à cette vérification de la même façon et ne pas accepter le sous-traitant si, au final, il est établi que le prix de règlement des prestations sous-traitées est anormalement bas (art. 62 II préc. de l’ordonnance).

    Les critères de choix des offres

    Comme auparavant, un marché public est attribué soit sur la base du critère unique du prix ou du coût global, soit au regard d'une pluralité de critères dont, obligatoirement, le prix ou le coût global.

    Il est à souligner que le prix ne peut être utilisé comme unique critère pour l’attribution de marchés de travaux quand bien même ceux-ci sont de faible importance. Il ne peut, en effet, être retenu comme seul critère que pour les marchés portant exclusivement sur l’achat de services ou fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d’un opérateur économique à l’autre (art. 62 II, 1° du décret).

    A noter que figurent désormais parmi les autres critères de choix possibles :

    - la garantie de la rémunération équitable des producteurs ;

    - ou les qualifications et l’expérience du personnel assigné à l’exécution du marché public lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d’exécution du marché public.

    Les nouvelles règles concernant l’exécution des marchés publics

    ▪ Aucune modification n'est à relever dans le régime des avances (art. 110 à 113 du décret) et dans celui des acomptes (art. 114 du décret).

    ▪ En revanche, la modification des marchés est à présent plus fortement encadrée par les textes (art. 139 et 140 du décret).

    Les cas de modification des marchés sont listés à l’art. 139, parmi lesquels on retrouve :

    - l'application d’une clause de réexamen ;

    - la nécessité de commander des prestations supplémentaires ;

    - la modification rendue nécessaire par des circonstances qu’un acheteur « diligent » ne pouvait pas prévoir ;

    - le changement du titulaire du marché ;

    - ou encore les modifications non substantielles.

    Le principal apport réside dans l'encadrement de la conclusion d’avenants par une double condition :

    - si le marché a été passé selon une procédure adaptée, l'avenant ne doit pas conduire à un dépassement des seuils de procédure formalisée ;

    - en toute hypothèse, l'avenant ne doit pas augmenter le montant initial du marché de 10% ou plus en fournitures et services, ou de 15 % ou plus en travaux.

    Une transparence accrue sur les marchés conclus

    Une transparence accrue sur les marchés conclus et leurs modifications

    L’obligation qui existait auparavant de publier au cours du premier trimestre la liste des marchés de plus de 20 000 € HT conclus l’année précédente ne figure plus dans les nouveaux textes.

    En revanche, les acheteurs ont l’obligation d’offrir sur leur profil d’acheteur, d’ici le 1er octobre 2018 au plus tard, un accès libre, direct et complet aux données essentielles de chaque marché conclu, quel que soit son montant, à l’exception des informations dont la divulgation serait contraire à l’ordre public.

    Ces données qui seront donc librement accessibles comprennent non seulement les informations concernant l’attribution du marché mais également celles relatives à toutes les modifications qui seront apportées au marché durant son exécution (art. 107 du décret).

    Un contrôle pourra être ainsi exercé, notamment par les entreprises concurrentes de celles attributaires des marchés, du respect des règles de modification des marchés, en particulier en ce qui concerne la conclusion des avenants. Le contrôle pourrait aussi porter sur le respect des règles de calcul des seuils de publicité et de procédure, afin de s’assurer que l’acheteur n’a pas scindé ses achats de façon irrégulière en n’appliquant pas les procédures requises, par exemple au regard du montant annuel des besoins réguliers en fournitures et services (cf. § 5 ci-avant).

    En outre, pour les marchés passés selon une procédure formalisée, les acheteurs devront publier un « avis de modification » au JOUE si, en cours d’exécution, le marché venait à être modifié pour l’un ou l’autre des motifs suivants : 1°) lorsque des travaux, fournitures ou services supplémentaires deviennent nécessaires, s’il s’avère impossible, pour des raisons économiques ou techniques et, qui plus est, fortement préjudiciable, de les confier à un opérateur autre que le titulaire du marché ; 2°) lorsque les modifications sont la conséquence de circonstances imprévues (art. 140 III du décret).

    Enfin, les acheteurs ont l’obligation de conserver les dossiers de marché pendant une durée minimale de 5 ans, les pièces constitutives des marchés de travaux, de maîtrise d’œuvre et de contrôle technique devant être conservées au moins dix ans à compter de la fin de l’exécution du marché (art. 108 du décret).

     

     



    Nous vous rappelons que HGI-ATD ne répond qu'aux sollicitations de ses adhérents. Toute demande de documentation, conseil ou assistance ne respectant pas cette condition ne pourra aboutir.

    Auteur :

    Arnaud DA SILVA, Chef du service juridique et Thierry PROUPECH, Service juridique

    Paru dans :

    ATD Actualité n°258

    Date :

    1 avril 2016

    Mots-clés