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    Le droit de préemption commercial

    Article

    Institué par la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises etdistinct du droit de préemption urbain (DPU), le droit de préemption sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux, les baux commerciaux et certains terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial a pour objectif de maintenir une offre commerciale de proximité et diversifiée.

    Ce droit de préemption permet aux communes et aux intercommunalités d’acquérir de façon prioritaire, dans un périmètre arrêté, lorsque leurs propriétaires les mettent en vente :

    • des fonds de commerce,
    • des fonds artisanaux,
    • des baux commerciaux,
    • des terrains portant des commerces ou destinés à porter des commerces dans un délai de cinq ans, d’une surface de vente comprise entre 300 et 1 000 m².

    Il oblige la collectivité ayant préempté à rétrocéder le bien dans un délai de deux ans.

    Peu usité en France jusqu’à présent, 422 communes seulement ayant institué, selon une dernière enquête de 2012, le droit de préemption commercial pour 81 biens acquis, les récentes dispositions introduites par la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises et son décret d’application du 24 juillet 2015 ont pour objectif d’améliorer l’exercice de ce droit de préemption. Il est codifié aux articles L.214-1 à L.214-3 et R.214-1 et suivants du code de l’urbanisme.

    L’institution du droit de préemption commercial

    Le conseil municipal délimite, par délibération motivée, un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, à l’intérieur duquel les aliénations à titre onéreux de fonds artisanaux, de fonds de commerce, de baux commerciaux, ainsi que les terrains portant ou destinés à porter des commerces d’une surface de vente entre 300 et 1 000 m², sont soumises au droit de préemption.

    Une grande souplesse est laissée à la commune qui peut définir librement le contour ainsi que la superficie du périmètre. Elle peut ainsi choisir uniquement le centre-ville, certains quartiers ou certaines rues.

    De plus, il n’existe pas de lien entre ce droit de préemption et un éventuel document d’urbanisme (Plan Local d’Urbanisme, Plan d’Occupation des Sols, carte communale).

    Le projet de délibération est préalablement soumis pour avis à la chambre de commerce et d’industrie et à la chambre des métiers et de l’artisanat.

    Il doit être accompagné du projet de périmètre et d’un « rapport analysant la situation du commerce et de l’artisanat de proximité à l’intérieur de ce périmètre et les menaces pesant sur la diversité commerciale et artisanale ».

    En l'absence d'observations de la chambre de commerce et d'industrie et de la chambre des métiers et de l'artisanat dans les deux mois de leur saisine, l'avis de l'organisme consulaire est réputé favorable.

    La délibération du conseil municipal délimitant le périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité est affichée en mairie pendant un mois. Mention en est insérée dans deux journaux diffusés dans le département.

    La délégation par la commune

    L’article L.2122-22-21° du code général des collectivités territoriales permet au conseil municipal de déléguer au maire ce droit de préemption.

    En outre, les communes ont désormais la possibilité de déléguer, par délibération, leur droit de préemption à un organisme tiers intéressé :

    •  établissement public de coopération intercommunale (EPCI),
    • établissement public y ayant vocation,
    • société d’économie mixte,
    • concessionnaire d’une opération d’aménagement
    • titulaire d’un contrat de revitalisation artisanale et commerciale.

    Cette délégation peut porter sur tout ou partie du périmètre de sauvegarde ou être accordée à l'occasion de l'aliénation d'un fonds de commerce, d'un fonds artisanal, d'un bail commercial ou de terrains. Les biens ainsi acquis entrent dans le patrimoine du délégataire.

    Ces délégations ont pour objet, selon l’exposé des motifs de la loi du 18 juin 2014, de renforcer l’utilisation de ce droit de préemption grâce à son exercice par des établissements dotés des ressources humaines et financières adaptées.

    La déclaration préalable à la cession

    Le cédant, dont le bien se situe dans un périmètre de protection commerciale instauré, doit transmettre à la commune une déclaration préalable (CERFA n° 13644*01), sous peine de nullité de l’acte de vente pendant un délai de cinq ans.

    Cette déclaration peut être déposée en mairie, ou envoyée par pli recommandé, ou adressée par voie électronique,

    Lorsque la commune a délégué son droit de préemption, le maire transmet la déclaration au délégataire. Lorsque le délégataire est un EPCI ayant lui-même délégué ce droit, son président transmet à son tour la déclaration à son délégataire.

    Alors que l’article L.214-1 du code de l’urbanisme prévoit que « la déclaration précise le prix, l'activité de l'acquéreur pressenti, le nombre de salariés du cédant, la nature de leur contrat de travail et les conditions de la cession. Elle comporte également le bail commercial, le cas échéant, et précise le chiffre d'affaires lorsque la cession porte sur un bail commercial ou un fonds artisanal ou commercial », la déclaration dans la pratique n’est pas, à ce jour, assez précise pour que le titulaire du droit de préemption apprécie la valeur réelle du fonds. En effet, le bail n’a pas à être joint à la déclaration, l’indication du chiffre d’affaires est facultative et la déclaration n’a pas pour obligation de préciser l’activité et l’identité du repreneur. Le titulaire du droit de préemption ne peut donc pas savoir si l’affectation commerciale est maintenue et s’il est opportun de préempter. C’est la raison pour laquelle certaines collectivités demandent aux cédants d’apporter des précisions complémentaires mais cela n’est pas prévu par les textes : « le formulaire Cerfa auquel renvoie l'article A. 214-1 du code de l'urbanisme définit l'intégralité des obligations du déclarant » (CE, 27 juillet 2015, n°374646).

    La décision de la collectivité

    Le silence du titulaire du droit de préemption pendant le délai de deux mois à compter de la réception de cette déclaration vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. Le cédant peut alors réaliser la vente aux prix et conditions figurant dans sa déclaration.

    Le titulaire du droit de préemption peut aussi décider :

    • de renoncer explicitement à l'exercice du droit de préemption,
    • d'acquérir aux prix et conditions indiqués dans la déclaration préalable,
    • d'acquérir aux prix et conditions fixés par la juridiction compétente en matière d'expropriation.

    La décision du titulaire du droit de préemption doit être notifiée au cédant par pli recommandé avec demande d'avis de réception, ou remise contre décharge au domicile ou au siège social du cédant, ou adressée par voie électronique si la déclaration a été faite de la même manière.

    Lorsque le cédant est lié par un contrat de bail, une copie de cette notification est adressée au bailleur.

    En cas d'acquisition par le titulaire du droit de préemption, l'acte constatant la cession est dressé dans un délai de trois mois suivant la notification de l'accord sur le prix et les conditions indiqués dans la déclaration préalable ou de la décision judiciaire devenue définitive fixant le prix et les conditions de la cession.

    Le prix est payé au moment de l'établissement de l'acte constatant la cession, sous réserve de respecter des dispositions du Code du Commerce telles que les formalités de publicité spécifiques et la possibilité donnée aux créanciers de s’opposer au paiement du prix.

    Comme toute préemption, la décision doit être motivée. S’est ainsi vue condamnée une commune ayant préempté un café-bar-PMU pour répondre à des plaintes liées à l’exploitation de ce fonds et non pour préserver les activités commerciales et artisanales (Conseil d’Etat, 26 avril 2013, n°362949).

    La rétrocession du bien préempté

    Une collectivité n’ayant pas vocation à rester propriétaire d’un fonds de commerce ou artisanal, le législateur a prévu sa rétrocession obligatoire dans le délai de deux ans à compter de la prise d’effet de la cession.

    Le repreneur doit être une entreprise immatriculée au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers et l’exploitation du fonds est destinée à préserver la diversité et à promouvoir le développement de l'activité commerciale et artisanale dans le périmètre concerné.

    Préalablement à la rétrocession, la commune définit un cahier des charges, approuvé par délibération du conseil municipal. L'acte de rétrocession prévoit ainsi les conditions dans lesquelles il peut être résilié en cas d'inexécution par le cessionnaire de ce cahier des charges.

    En outre, la commune organise une mise en concurrence et publie, par voie d'affichage en mairie pendant une durée de quinze jours, un avis de rétrocession, qui comporte un appel à candidatures, la description du fonds, du bail ou du terrain et le prix proposé. Le code ne fixant aucun critère de sélection des candidats, la commune est libre de définir elle-même les règles de la mise en concurrence et de la sélection.

    En cas de rétrocession d'un bail commercial, le titulaire du droit de préemption recueille l'accord préalable du bailleur sur le projet d'acte accompagné du cahier des charges. Cette formalité est obligatoire. Le bailleur a la possibilité, dans le délai de deux mois, de saisir le président du tribunal de grande instance pour faire valider son opposition à la rétrocession. Le propriétaire des murs garde donc un rôle déterminant dans cette faculté d’agréer ou non le repreneur du bail.

    Une fois le choix d’un repreneur fait, la rétrocession est autorisée par délibération du conseil municipal, indiquant les conditions de la rétrocession et les raisons du choix du cessionnaire.

    Dans le mois suivant la signature de l'acte de rétrocession, le maire procède à l'affichage en mairie, pendant une durée de quinze jours, d'un avis comportant la désignation sommaire du fonds, du bail ou du terrain rétrocédé, le nom et la qualité du cessionnaire, ainsi que les conditions financières de l'opération.

    En outre il convient de préciser que pendant le délai de deux ans au terme duquel la rétrocession est obligatoire, le titulaire du droit de préemption peut mettre le fonds en location-gérance. Dans ce cas, la collectivité a un délai de trois ans pour rétrocéder le fonds de commerce ou le fonds artisanal. Cette exploitation précaire permet au fonds de ne pas perdre de son attractivité au moment de la rétrocession.

    Enfin, si la rétrocession n'est pas intervenue à l'expiration du délai de deux ou trois ans, l'acquéreur évincé, dans le cas où son identité a été mentionnée dans la déclaration préalable, bénéficie d'un droit de priorité d'acquisition.

     

     



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    Auteur :

    Victoire LANNEUW, service urbanisme

    Paru dans :

    ATD Actualité n°251

    Date :

    1 septembre 2015

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