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    La loi « sapin 2 »

    Article

    1. Le renforcement de la transparence
      1. Des règles déontologiques pour les représentants d’intérêts (les lobbies)
      2. Un statut plus protecteur pour les lanceurs d’alerte
      3.  Le renforcement de la transparence dans le secteur agricole
    2. LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
      1. La création de l’Agence française anticorruption
      2.  L’instauration d’un nouveau dispositif transactionnel
    3. La modernisation de la vie économique
      1. La modernisation des règles de la domanialité publique
      2.  La modernisation des règles de la commande publique
      3. Autres mesures

    12 juillet 2017

    La loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, dite « Sapin 2 »  a été adoptée par le Parlement le 8 novembre 2016, puis validée définitivement par le Conseil constitutionnel le 8 décembre 2016.

    L’élaboration de ce nouveau texte s’est appuyée sur un ensemble d’études et de rapports nationaux au premier rang desquels celui de M. Jean-Louis Nadal, président de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP).

    Cette nouvelle loi  est composée de 3 volets : le renforcement de la transparence dans le processus d’élaboration des décisions publiques et dans la vie économique, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, dont les points essentiels sont exposés dans la présente fiche.

     

    Le renforcement de la transparence

    Des règles déontologiques pour les représentants d’intérêts (les lobbies)

    La loi créé un « répertoire numérique public des représentants d’intérêts auprès des personnes publiques », c'est-à-dire des lobbies.

    Sont des autorités publiques susceptibles d’être contactées par des représentants d’intérêts : les membres du Gouvernement, dont le Premier ministre, leurs collaborateurs, les parlementaires, les élus locaux et les hauts fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales.

     Pour pouvoir entrer en contact avec ces personnes, tout représentant d’intérêts devra être inscrit sur un nouveau répertoire qui sera tenu par la HATVP, et lui fournir par ailleurs les informations suivantes :

     - son identité, lorsqu’il s’agit d’une personne physique, ou celle de ses dirigeants lorsqu’il s’agit d’une personne morale ;

    - le champ de ses activités de représentation d’intérêts et le montant des dépenses liées à ces activités l’année précédente ;

    - le nombre de personnes qu’il emploie dans l’accomplissement de sa mission de représentation d’intérêts et, le cas échéant, son chiffre d’affaires de l’année précédente ;

    - les organisations professionnelles ou syndicales ou les associations en lien avec les intérêts représentés auxquelles il appartient.

     Tous les représentants d’intérêts devront en outre respecter des règles déontologiques dans leurs relations avec les autorités publiques :

    - déclarer leur identité, l’organisme pour lequel ils travaillent et les intérêts ou entités qu’ils représentent dans leurs relations avec les pouvoirs publics ;

    - s’abstenir de proposer ou de remettre à ces personnes des présents, dons ou avantages quelconques d’une valeur significative ;

    - s’abstenir de toute démarche auprès de ces personnes en vue d’obtenir des informations ou des décisions par des moyens frauduleux ;

    - s’abstenir d’obtenir ou d’essayer d’obtenir des informations ou décisions en communiquant délibérément à ces personnes des informations erronées ou en recourant à des manœuvres destinées à les tromper ;

    - s’abstenir d’organiser des colloques, manifestations ou réunions, dans lesquels les modalités de prise de parole de ces personnes sont liées au versement d’une rémunération ;

    - s’attacher à respecter l’ensemble des règles précédentes dans leurs rapports avec l’entourage direct avec ces personnes.

    En cas de manquement à ces règles, la HATVP adresse une mise en demeure au représentant d’intérêts, suivie le cas échéant, d’une peine  an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

     Enfin il faut noter que sont exclus de la qualification de représentant d'intérêts les élus dans l’exercice de leur mandat, les partis politiques, les syndicats, les associations cultuelles et les associations d'élus "dans l'exercice des missions prévues dans leurs statut" (art. 25 I).

    Un statut plus protecteur pour les lanceurs d’alerte

    La nouvelle loi instaure de nouvelles mesures de protection en faveur des lanceurs d’alerte (personnes qui signalent des comportements frauduleux ou des risques graves) en complément de celles contenues dans la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui prévoit la protection de toute personne qui relate ou signale de bonne foi à son employeur, à une association de lutte contre la corruption agréée ou aux autorités judiciaires ou administratives des faits relatifs à une situation de conflit d'intérêts, concernant des responsables publics dont elle aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions, et dans la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013, relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, qui intègre un article dans le code du travail au profit du salarié relatant ou témoignant, de bonne foi, des faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

     L’article 7 du nouveau texte confère aux lanceurs d’alerte une irresponsabilité pénale pour la divulgation de certains secrets protégés par la loi. L'article 8 organise la procédure de signalement de l'alerte en trois phases successives : auprès de l'employeur, puis auprès d'une autorité administrative ou judiciaire et, enfin, en l'absence de traitement, auprès du public.

     Le texte impose par ailleurs aux entreprises d'au moins cinquante salariés et aux collectivités territoriales et leurs groupements de plus de 10.000 habitants l'obligation d'établir des procédures appropriées de recueil des alertes émises par les membres de leur personnel ou par des collaborateurs extérieurs et occasionnels. Les conditions en seront précisées par décret.

     Enfin, les mesures de protection des lanceurs d’alerte contre les risques de représailles sont précisées aux articles 9 et 10. Elles ont pour but de couvrir les situations du type de celles d’Antoine Deltour (à l'origine du scandale LuxLeaks sur les pratiques d'optimisation fiscale des multinationales au Luxembourg).

     L'article 11 prévoit un mécanisme d'injonction permettant au juge administratif d'ordonner la réintégration d'un agent public qui aurait fait l'objet d'une mesure de représailles au motif qu'il a lancé une alerte éthique. L'article 13 crée, en outre, un délit d'entrave au signalement, puni d'un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende (30.000 euros en cas de plainte abusive pour diffamation).

     Ces nouvelles dispositions ne seront toutefois pas applicables lorsque les faits en cause seront relatifs au secret de la défense nationale, au secret médical ou celui applicable entre un avocat et son client.

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    Le décret n° 2017-564 du 19 avril 2017 relatif aux procédures de recueil des signalements émis par les lanceurs d’alerte au sein des personnes morales de droit public ou de droit privé ou des administrations de l’Etat,  définit cette notion de lanceur d'alerte et précise les modalités suivant lesquelles ces procédures de recueil des signalements sont établies.

     Le renforcement de la transparence dans le secteur agricole

    La loi améliore la régulation des secteurs agricoles et agroalimentaires en favorisant la transparence sur l’ensemble de la chaîne de production pour aller vers une meilleure répartition de la valeur ajoutée entre les producteurs et les distributeurs.

     Elle permet aussi aux acteurs de disposer d'une meilleure visibilité sur leurs prix en favorisant la construction de relations commerciales plus durables à travers des négociations qui pourront désormais couvrir une période allant jusqu’à trois ans.

    LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION

    La création de l’Agence française anticorruption

    La loi crée une Agence française anticorruption, service placé sous l’autorité conjointe des ministres de la Justice et des Finances. Elle sera dirigée par un magistrat expérimenté, nommé par décret du Président de la République pour une durée de six ans non renouvelable. Celui-ci disposera d’une indépendance fonctionnelle à l’égard des deux ministres pour l’accomplissement de certaines de ses missions. Les effectifs de l’agence compteront 70 personnes environ et son budget annuel sera compris entre 10 et 15 millions d’euros.

     Les principales missions de cette nouvelle agence sont définies ci-après :

    - élaborer des recommandations destinées à aider les personnes morales de droit public et de droit privé à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme ;

    - contrôler, de sa propre initiative, la qualité et l’efficacité des procédures mises en œuvre au sein des administrations de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d’économie mixte, et des associations reconnues d’utilité publique pour prévenir et détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme ;

    - aviser le procureur de la République compétent, y compris le cas échéant à l’étranger, des faits dont elle a eu connaissance dans l’exercice de ses missions et qui sont susceptibles de constituer un crime ou un délit ;

    - élaborer chaque année un rapport d’activité rendu public.

     L’instauration d’un nouveau dispositif transactionnel

    Le texte (article 22) introduit un dispositif transactionnel novateur, la convention judiciaire d'intérêt public, qui pourra être proposée par le procureur de la République avant l'engagement des poursuites, ou par le juge d'instruction, à une entreprise mise en cause pour atteinte à la probité ou blanchiment de fraude fiscale.

     Dans ce cadre procédural, l’entreprise devra verser une amende au Trésor public dont le montant est proportionné aux avantages tirés des manquements constatés dans la limite de 30 % de son chiffre d’affaires annuel.

     Elle devra également se soumettre, pour une durée maximale de trois ans et sous le contrôle de l’Agence française anticorruption, à un programme de mise en conformité de ses procédures de prévention et de détection de la corruption et du trafic d’influence.

    La modernisation de la vie économique

    La modernisation des règles de la domanialité publique

    L’article 34 autorise le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance et dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, certaines mesures concernant le droit des propriétés publiques, ci-après définies.

     La mise en concurrence des autorisations d’occupation temporaire du domaine public, contractuelles comme unilatérales :

    L’introduction de cette mesure est rendue nécessaire par une décision récente de la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE, 14 juillet 2016, aff. C-458/14 et C-67/15) pour ce qui concerne les autorisations délivrées en vue de l’exercice par l’occupant d’une activité économique sur le domaine public. Il reviendra au Gouvernement de clarifier, par ordonnance, les autorisations d’occupation concernées par cette obligation et les règles procédurales de ce nouveau régime de mise en concurrence.

    Ces mesures concerneront l’Etat et les établissements publics nationaux mais pourront, le cas échéant, s’appliquer ou être adaptées aux collectivités territoriales, à leurs groupements ainsi qu’à leurs établissements publics.

     La mise en concurrence des ventes immobilières :

    Le Gouvernement est également habilité à édicter, par voie d’ordonnance, des règles tendant à soumettre à des obligations de publicité et de mise en concurrence préalables les opérations de cessions immobilières.

    Cette mesure a pour objet de généraliser le régime déjà applicable aux cessions des biens de son domaine privé par l’Etat (art. R. 3211-2 du code général de la propriété des personnes publiques –  CG3P). Le texte précise là aussi que les ventes d’immeubles des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics pourront également être concernées.

     L’article 35 modifie par ailleurs l’article L. 2141-2 du CG3P en étendant aux collectivités territoriales, à leurs groupements et à leurs établissements publics la possibilité d’ores et déjà offerte à l’Etat et ses établissements publics de bénéficier de la faculté dite de « déclassement anticipé » , c’est-à-dire de pouvoir procéder à une vente même lorsque le bien objet de la vente est encore affecté à un service public ou à l’usage direct du public. L’acte de vente est alors assorti d’une condition résolutoire liée à l’intervention effective de la désaffectation.

     La modernisation des règles de la commande publique

    La loi Sapin 2 procède à la ratification des ordonnances marchés publics (n° 2015-899 du 23 juillet 2015) et concessions (n° 2016-65 du 29 janvier 2016), abrogées et remplacées à droit constant depuis le 1er avril 2019 par le code de la commande publique, leur donnant ainsi valeur législative.

     L’article 39 apporte quelques aménagements à l’ordonnance relative aux marchés publics dont les plus notables sont :

    - la suppression de la possibilité, qui était prévue à l’article 32 de l’ordonnance,  de présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus ;

    - l’obligation pour l’acheteur de mettre en œuvre tous moyens pour détecter les offres anormalement basses de manière à les écarter ;

    - le remplacement de l’obligation, mentionnée à l’article 45 de l’ordonnance, de produire des extraits de casier judiciaire pour prouver l’absence de condamnation pénale constitutive d’une interdiction de soumissionner par la production de simples attestations sur l’honneur ;

    - la possibilité d’attribuer un marché public sur la base d’un critère unique dans des conditions qui seront précisées par décret ;

    l’obligation de motiver le choix de ne pas allotir un marché public par « des considérations de droit et de fait ».

    L’article 38 prévoit par ailleurs l’adoption, dans un délai de deux ans, d’un code de la commande publique, qui regroupera les règles relatives aux marchés publics et aux contrats de concession.

    Autres mesures

    D’autres mesures, qui intéressent moins les collectivités territoriales, concernent notamment l’encadrement de la rémunération des dirigeants d’entreprises, l’encouragement de l’entrepreneuriat, la simplification de la gestion de l’entreprise, l’interdiction de la publicité pour les sites de trading sur instruments risqués et la mobilisation de l’épargne des Français vers le financement d’entreprises sociales et solidaires.

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    Pour aller plus loin : tableau récapitulatif des principales dispositions de la loi Sapin 2

    Annexe : tableau récapitulatif des principales dispositions de la loi Sapin 2

     

    Principales mesures

    Articles concernés de la loi

    I/ Mesures visant à renforcer la transparence

    Création d’un répertoire numérique public des représentants d’intérêts (lobbies).

    25 I

    Institution de règles déontologiques pour les représentants d’intérêts.

    25 I

    Définition des autorités publiques susceptibles d’être contactées par des représentants d’intérêts.

    25 I

    Sanctions à l’encontre des représentants d’intérêts en cas de non-communication de certaines informations à la HATVP.

     

    25 I

    Exclusion des partis politiques, des syndicats, des associations cultuelles et des associations d'élus de la qualification de  représentants d’intérêts.

    25 I

    Irresponsabilité pénale des lanceurs d’alerte pour la divulgation de certains secrets protégés par la loi.

    7

    Organisation de la procédure de signalement de l'alerte.

    8 I

    Obligation pour les entreprises d'au moins cinquante salariés et aux collectivités territoriales et leurs groupements de plus de 10.000 habitants d'établir des procédures de recueil des alertes

    8 III

    Mesures de protection des lanceurs d’alerte contre les risques de représailles

    9 et 10

    Mécanisme d'injonction permettant au juge administratif d'ordonner la réintégration d'un agent public qui aurait fait l'objet d'une mesure de représailles au motif qu'il a lancé une alerte éthique.

    11

    Institution d’un délit d’entrave au signalement.

    13

    Renforcement de la transparence dans le secteur agricole

    94 à 111

    II/ Mesures visant à lutter contre la corruption

    Création et composition de l’Agence française anticorruption

    1 et 2

    Missions de l’Agence française anticorruption

    3

    Instauration d’un dispositif transactionnel pouvant être proposé à une entreprise mise en cause pour atteinte à la probité ou blanchiment de fraude fiscale.

     

    22

    III/ Mesures visant à la modernisation de la vie économique

    Mise en concurrence des autorisations d’occupation temporaire du domaine public (par voie d’ordonnance dans un délai de 12 mois).

    34 1°

    Mise en concurrence des ventes de terrains par les établissements publics nationaux et le cas échéant par les collectivités territoriales (par voie d’ordonnance dans un délai de 12 mois).

    34 2°

    Extension aux collectivités territoriales et à leurs groupements de la possibilité de bénéficier de la faculté dite de « déclassement anticipé », c’est-à-dire de pouvoir procéder à une vente même lorsque le bien objet de la vente est encore affecté à un service public ou à l’usage direct du public.

     

    35

    Suppression, dans les marchés publics, de la possibilité de présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus. 

    39 II 1° a)

    Obligation pour les acheteurs publics de mettre en œuvre tous moyens pour détecter les offres anormalement basses de manière à les écarter.

    39 II 5°

    Remplacement, dans les marchés publics, de l’obligation de produire des extraits de casier judiciaire pour prouver l’absence de condamnation pénale constitutive d’une interdiction de soumissionner par la production de simples attestations sur l’honneur. 

    39 II 3°

    Possibilité d’attribuer un marché public sur la base d’un critère unique dans des conditions qui seront précisées par décret.

    39 II 4°

    Obligation de motiver le choix de ne pas allotir un marché public par « des considérations de droit et de fait ». 

    39 II 1° b)

    Adoption, par voie d’ordonnance dans un délai de deux ans, d’un code de la commande publique, qui regroupera les règles relatives aux marchés publics et aux contrats de concession.

    38



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°267

    Date :

    1 janvier 2017

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