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    En cas de restitution des compétences par les intercommunalités, quels modes de gestion pour les communes ?

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    1. Les solutions institutionnelles pour poursuivre l’exercice en commun des compétences restituées
      1. La création de services communs
      2. La constitution de syndicats dans des matières strictement limitées
    2. Les solutions contractuelles pour poursuivre l’exercice en commun des compétences restituées
      1.  L’entente intercommunale
      2.  La création d’un service unifié
      3. La conclusion d’une convention de gestion avec la communauté 
      4. La convention de coopération public-public
      5.  Une gestion purement communale des compétences restituées

     

    Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre issus des fusions entrées en vigueur au 1er janvier 2017 ont jusqu’au 31 décembre 2018 pour décider de restituer tout ou partie des compétences supplémentaires des EPCI fusionnés (article L.5211-41-3 du code général des collectivités territoriales -CGCT-). La même date s’applique à la définition de l’intérêt communautaire des compétences dont l’exercice est conditionné à cette définition.

     Il en résulte que sur certains territoires, des compétences qui avaient été mises en œuvre par les intercommunalités vont faire retour aux communes qui devront alors s’organiser pour en poursuivre l’exercice, si tant est qu’elles le souhaitent.

    La question se pose avec d’autant plus d’acuité que les communes en question peuvent avoir perdu tout lien avec la compétence qui relevait de l’intercommunalité : soit parce que le transfert au profit de cette dernière est intervenu il y a de nombreuses années ; soit parce qu’il s’agit d’une compétence qui n’existait pas au niveau communal et qui a été développée par la communauté.

    Ce Conseil en diagonale présente donc les différentes solutions qui permettent aux communes de poursuivre l’exercice d’une compétence qui auparavant relevait de l’intercommunalité.

    Les solutions institutionnelles pour poursuivre l’exercice en commun des compétences restituées

    La création de services communs

    En vertu de l’article L.5211-4-2 du CGCT, et sous réserve de se situer en dehors des compétences transférées, un EPCI à fiscalité propre, une ou plusieurs de ses communes membres et, le cas échéant, un ou plusieurs des établissements publics rattachés à un ou plusieurs d'entre eux (tel qu’un CCAS ou un CIAS), peuvent se doter de services communs, chargés de l'exercice de missions fonctionnelles ou opérationnelles.

    Selon une circulaire de la DGCL[1], la poursuite de l’exercice d’une compétence restituée aux communes membres peut valablement s’envisager dans le cadre de la création d’un service commun et ne viser que les communes initialement membres d’un des EPCI fusionnés.

     Les effets de ces mises en commun sont réglés par convention liant la communauté à la ou aux communes intéressées par ce service, après établissement d'une fiche d'impact décrivant notamment les effets sur l'organisation et les conditions de travail, la rémunération et les droits acquis pour les agents. La fiche d'impact et les accords conclus sont annexés à la convention. La convention et ses annexes sont soumises à l'avis du ou des comités techniques compétents. Pour les services de l’État, la création d’un tel service suppose que chaque collectivité signataire du service commun abonde ce dernier en moyens (humains et/ou matériels) afin d’en rendre possible son fonctionnement.

    D’un point de vue financier, les services communs donnent lieu à refacturation à hauteur de leur utilisation. Pour les établissements publics soumis au régime de la fiscalité professionnelle unique (article 1609 nonies C du code général des impôts -CGI-), il est également possible d’imputer ce coût sur l'attribution de compensation. Dans ce cas, le calcul du coefficient d'intégration fiscale prend en compte cette imputation. Concrètement, cela signifie que dans cette hypothèse, le coût de fonctionnement du service commun pour chacune des communes est répercuté sur l’attribution de compensation qui leur est versé. Toutefois, et contrairement à ce qui est prévu dans le cadre d’un transfert de compétences, le montant répercuté a vocation à évoluer d’année en année suivant le coût réel de fonctionnement du service (« Guide pratique sur les attributions de compensation », fiche n°5, DGCL).

    En principe, les services communs sont gérés par l'EPCI à fiscalité propre. A titre dérogatoire, un service commun peut toutefois être géré par la commune choisie par le conseil communautaire.

    Le sort des agents est également réglé par l’article L.5211-4-2 du CGCT. Ainsi, les agents qui remplissent en totalité leurs fonctions dans le service commun sont transférés de plein droit, après avis, selon le cas, de la commission administrative paritaire (CAP) ou de la commission consultative paritaire (CCP) compétente, à l’EPCI à fiscalité propre ou à la commune chargée du service commun. Les fonctionnaires et agents non titulaires qui remplissent en partie leurs fonctions dans un service ou une partie de service mis en commun sont de plein droit mis à disposition, sans limitation de durée, à titre individuel, de l’EPCI à fiscalité propre ou de la commune chargé du service commun pour le temps de travail consacré au service commun.

    L’intérêt de ce dispositif est donc de continuer à faire relever de la communauté, une compétence qui, en théorie, a été restituée aux communes. Bien que l’on puisse s’interroger de la pertinence de cet outil dans ce cas de figure alors qu’il semblait initialement se limiter à un partage de service entre communauté et communes (sur des services fonctionnels tels que les ressources humaines), la DGCL a clairement validé la possibilité de l’utiliser pour éviter les restitutions de compétences lors des fusions.

    La constitution de syndicats dans des matières strictement limitées

    La seconde solution pour poursuivre l’exercice en commun d’une compétence restituée consiste à créer un syndicat de communes idoine.

    Il convient toutefois de relever que cette solution apparaît assez théorique. En effet, l’article L.5111-6 du CGCT indique que :

    « La création d'un syndicat de communes visé à l'article L.5212-1 ou d'un syndicat mixte visé à l'article L.5711-1 ou à l'article L.5721-1 ne peut être autorisée par le représentant de l'Etat dans le département que si elle est compatible avec le schéma départemental de coopération intercommunale mentionné à l'article L.5210-1-1 ou avec les orientations en matière de rationalisation mentionnées au III du même article L.5210-1-1 ».

    Or, l’une des orientations du schéma est notamment la réduction du nombre de syndicats, ce qui apparaît contradictoire avec la création de nouvelles structures.

    Il existe certes des exceptions à ces dispositions mais uniquement pour la création de syndicats compétents en matière de construction ou de fonctionnement d'école préélémentaire ou élémentaire, en matière d'accueil de la petite enfance ou en matière d'action sociale.

    Par ailleurs, même dans ces hypothèses, le Préfet dispose d’un pouvoir discrétionnaire sur la création d’une telle structure : il peut donc la refuser, sauf erreur manifeste d’appréciation (CAA de Bordeaux, 15 février 2005, n° 01BX00685).

    C’est pourquoi, la création d’un syndicat de communes pour reprendre l’exercice de compétences restituées n’apparaît envisageable que dans les matières rappelées ci-dessus. Il est également vivement recommandé de contacter les services de la Préfecture ou de la sous-préfecture pour obtenir un accord de principe préalablement à l’engagement de toute procédure de création.  

    Les solutions contractuelles pour poursuivre l’exercice en commun des compétences restituées

    Si la communauté n’a pas vocation à reprendre l’exercice d’une compétence restituée sous la forme d’un service commun ou que la création d’un syndicat de communes n’apparaît pas possible, il existe des solutions contractuelles qui permettent de poursuivre l’exercice en commun de la compétence restituée.  

    Toutefois, et contrairement aux solutions institutionnelles qui vont permettre de confier la compétence à une personne morale distincte des communes, la conclusion d’un contrat a simplement pour objet d’organiser l’exercice de la compétence qui continue à relever des communes.

     L’entente intercommunale

    En vertu de l’article L.5221-1 et suivants du CGCT, l’entente est un accord entre deux ou plusieurs conseils municipaux ou organes délibérants d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou de syndicats mixtes, portant sur des objets d’utilité communale ou intercommunale compris dans leurs attributions et intéressant les communes, les EPCI ou les syndicats mixtes qu’ils représentent.

    L’objet d’une entente est ainsi très large : elle peut être utilisée pour gérer des locaux, installations ou équipements communs, ou exercer en commun un service public.

     L’entente est formalisée par la conclusion d’une simple convention ; il n’y a donc pas création d’une nouvelle personne juridique distincte de ses membres. Chaque commune participante doit approuver, par délibération du conseil municipal, le projet de convention. Dans ce cadre, chaque collectivité participante s’engage à contribuer ou fournir les moyens nécessaires à la gestion de l’ouvrage ou du service public commun. Le CGCT fixe de façon très succincte les modalités d’organisation et de fonctionnement des ententes. C’est la convention constitutive qui doit compléter et préciser celles-ci.

     Pour l’essentiel, la loi prévoit la mise en place d’une commission spéciale, appelée conférence, réunissant des représentants des communes membres, où sont débattues les questions d’intérêt commun. Chaque organe délibérant désigne, au scrutin secret, trois représentants pour siéger au sein de la conférence (article L.5221-2 du CGCT). La conférence est une instance de discussion et de proposition. Elle ne détient aucun pouvoir décisionnel. Les propositions qu’elle formule, relatives à la gestion de l’entente, prennent la forme de délibérations, mais elles ne deviennent exécutoires que si elles sont ratifiées par les conseils municipaux de toutes les communes participantes. La règle de l’unanimité régit, en effet, le fonctionnement des ententes. La répartition des dépenses (fonctionnement et investissement) est librement réglée par la convention constitutive de l’entente.

    Le sort du personnel n’étant pas réglé par le CGCT, il sera nécessaire d’en prévoir les modalités pour assurer le service, par exemple, sur la base d’une mise à disposition statutaire au sens de l’article 61 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

    L’entente intercommunale est fréquemment utilisée pour permettre l’exercice de compétences restituées notamment en matière scolaire. Son principal inconvénient tient à la nécessité de faire approuver l’ensemble des décisions par l’unanimité des communes. Cette solution a donc plutôt vocation à s’appliquer lorsque la compétence concerne peu de communes.

     La création d’un service unifié

    La seconde solution consiste à créer un service unifié au sens de l’article L.5111-1 du CGCT. Cet article indique en effet que des conventions ayant pour objet la réalisation de prestations de services peuvent être conclues entre des communes membres d'un même EPCI à fiscalité propre lorsque le rapport relatif aux mutualisations de services le prévoit (article L.5111-1 du CGCT).

     Ces conventions peuvent prévoir :

    - soit la mise à disposition du service et des équipements d'un des cocontractants à la convention au profit d'un autre de ces cocontractants ;

    - soit le regroupement des services et équipements existants de chaque cocontractant à la convention au sein d'un service unifié relevant d'un seul de ces cocontractants.

    Comme pour l’entente, le service unifié est créé par convention approuvée par chacun des conseils municipaux. La conclusion de cette convention échappe aux obligations de publicité et de mise en concurrence du droit de la commande publique, dès lors que la prestation de services est réalisée dans le cadre du service unifié et que ce dernier revêt l’une des deux formes rappelées ci-dessus.

    La convention prévoira les modalités de fonctionnement et d’utilisation du service. Enfin, dans le cas de la création d’un service unifié, la convention doit fixer, après avis des comités techniques compétents, les effets sur le personnel concerné. La situation du personnel n’est pas réglée en détail par le CGCT. Tout au plus, est-il précisé que le personnel du service unifié sera placé sous l'autorité fonctionnelle du maire de la commune pour laquelle il exerce sa mission. La convention fixe les conditions de remboursement des frais de fonctionnement du service, selon les modalités précisées à l’article R.5111-1 du CGCT.

    La conclusion d’une convention de gestion avec la communauté 

    Il est également possible que les communes qui ont récupéré la compétence souhaitent continuer à faire assurer le service par la communauté dont elles sont membres. L’accord de cette dernière est bien évidemment indispensable.

    Selon la doctrine ministérielle, les articles L.5214-16-1 (pour les communautés de communes), L.5215-27 (pour les communautés urbaines), L.5217-7 (pour les métropoles) et L.5216-7-1 (pour les communautés d’agglomération) du CGCT constituent une habilitation légale pour les EPCI à fiscalité propre à conventionner (sous la forme de contrats dénommés conventions de gestion) pour réaliser des prestations de services au profit de leurs communes membres et réciproquement. A titre d’exemple, une commune a pu se voir confier par la communauté d’agglomération à laquelle elle adhérait la gestion et l’aménagement d’un port pour une période transitoire (CAA de Nantes, 17 avril 2015, n° 13NT01966). A l’inverse, il est possible pour une commune membre de confier, par convention, la gestion d’un service relevant de sa compétence à l’EPCI à fiscalité propre auquel elle appartient.

    Toutefois, cette convention n’entraîne pas de transfert de la compétence mais simplement une délégation de la gestion du service. Il s’agit d’une convention de prestations de service qui peut s’apparenter à un marché public. Une telle convention est toutefois exonérée des obligations de publicité et de mise en concurrence préalables en application des dispositions des articles L. 2511-1 et suivants du code de la commande publique puisqu’elle est conclue entre un groupement et une commune membre et qu’elle répond ainsi aux critères de la quasi régie (in house).

    Pour autant, l’utilisation de ce dispositif ne permet pas à la commune de se déposséder de sa qualité d’autorité organisatrice du service. Dans le cadre de la convention de gestion, celle-ci confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un tiers. Elle doit donc en conserver la maîtrise. Elle reste donc compétente pour adopter les tarifs (éventuellement sur proposition de la commune gestionnaire) et pour organiser le service (horaires, règlement intérieur). Par ailleurs, elle doit mettre en place des outils de contrôle financier (validation d’un budget prévisionnel, présentation d’un bilan financier annuel, par exemple) et de contrôle de la bonne exécution du service (mise en place d’une commission, gestion des difficultés entre le gestionnaire et les usagers, rapport annuel d’activité, par exemple).

     

    La convention de coopération public-public

    Enfin, et à défaut de pouvoir s’appuyer sur un des dispositifs précédents, il est possible que les communes intéressées concluent une convention de coopération public-public au sens de l’article L. 2511-1 du code de la commande publique.

    Il est en effet reconnu aux personnes publiques le droit de s’organiser librement pour exécuter les missions dont elles ont la charge. Néanmoins, ce droit n’a pas pour effet d’exclure en soi l'application des règles relatives aux marchés publics. Ce type de conventions ne sera donc pas soumis aux règles de publicité et de mise en concurrence que si les conditions suivantes sont cumulativement remplies :

    - Le rapport entre les cocontractants doit se caractériser par une réelle coopération et aller au-delà d’une prestation de services en contrepartie d’une simple rémunération. Il n'est pas indispensable que tous les pouvoirs adjudicateurs participants se chargent de l'exécution des principales obligations contractuelles, pour autant que l'engagement ait été pris de coopérer à l'exécution de la mission de service public en question.

    - Elle doit avoir lieu dans le but de garantir que les services publics dont ils ont la responsabilité sont réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu’ils ont en commun. La mise en œuvre de la coopération, y compris tout transfert financier entre les participants, ne doit obéir qu'à des « considérations d'intérêt public ».

    - Enfin, les activités concernées par la coopération doivent représenter moins de 20 % des activités réalisées sur le marché concurrentiel. Par ailleurs, aucun prestataire privé de services ne doit être placé dans une position privilégiée par rapport à ses concurrents. Le prix de la prestation doit, de surcroît, respecter les règles de la libre concurrence (CE, 8 novembre 2000, Sté Jean-Louis Bernard Consultant n° 222208) selon lesquelles le prix proposé par la personne publique doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat.

     Une gestion purement communale des compétences restituées

    Dans certaines situations, il est possible que la compétence restituée ait vocation à être gérée en propre par chaque commune.

    A cet effet, l’on rappellera que la restitution de compétences doit s’accompagner d’une restitution et/ou répartition des biens mobiliers et immobiliers (cf. article L.5211-25-1 du CGCT), des personnels (article L.5211-4-1 du CGCT) et des moyens financiers (avec révision de l’attribution de compensation dans les conditions fixées à l’article 1608 nonies C du CGI pour les EPCI à FPU) afin de leur permettre d’assurer l’exercice de la compétence.   

    Une fois cette dernière restituée, le choix des modalités de son exercice relève donc de la seule responsabilité de la commune (l’on réservera seulement l’hypothèse où un contrat -marché public ou délégation de service public- avait été conclu par l’EPCI pour permettre l’exercice de la compétence. Ce contrat a en effet vocation à perdurer sauf accord contraire des parties). 

     Chaque commune peut ainsi décider de gérer le service en régie directe, si elle dispose des moyens pour remplir sa mission. Elle peut également décider de le confier à un prestataire de service dans le cadre d’un marché public ou d’un contrat de concession.

    Dans ces deux dernières situations, les communes qui ont récupéré la compétence en cause peuvent conventionner entre elles afin de constituer des groupements de commandes pour passer -voire exécuter pour les marchés publics- conjointement ces contrats et permettre ainsi de réaliser des économies d’échelle. Le groupement de commande en matière de marchés publics est régi par les dispositions de l’article L. 2113-6 du code de la commande publique  et celui en matière de concession est prévu par l’article  L. 3112-1 du code de la commande publique.

     

    [1] DGCL - Fiches pratiques pour la fusion d’EPCI à fiscalité propre, « 2. Les services communs » novembre 2015.



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°282

    Date :

    1 juin 2018

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