Responsabilité unifiée des gestionnaires publics : deux nouvelles jurisprudences et une QPC sur le montant des amendes
Pour rappel, ce régime a été institué par l'ordonnance du 23 mars 2022 et depuis le 1er janvier 2023, les ordonnateurs et les comptables publics sont justiciables devant les mêmes juridictions, à savoir en 1ère instance devant la chambre du contentieux de la cour des comptes, en appel devant la cour d'appel financière et en cassation devant le Conseil d'Etat.
Il concerne donc l’ensemble des gestionnaires publics, c'est-à-dire les ordonnateurs et comptables, à l'exception toutefois des élus locaux et des personnes qui suivent les instructions de leurs supérieurs hiérarchiques ou détenant un ordre écrit de l'élu local.
Les élus locaux peuvent néanmoins voir leur responsabilité financière engagée, dans les trois cas suivants :
- Inexécution d’une décision de justice entraînant le prononcé d’une astreinte (code de juridictions financières (CJF), art. L. 131-4) ;
- avantages injustifiés consentis à autrui ou à soi-même (CJF, art. L. 131-12) ;
- gestion de fait (CJF, art. L. 131-15).
Dans le cadre du suivi de la mise en œuvre de ce nouveau régime, on peut relever deux nouvelles jurisprudences de la Cour des Comptes en date du 2 septembre 2025.
- La première affaire ( Arrêt n° 61 - n° S-2025-1208) impliquait un directeur d'établissement public, qui sans en avoir le pouvoir, ni disposer d'une délégation avait engagé des dépenses relatives aux achats de cet établissement. Ces dépenses se sont élevées pour la période comprise entre 2019 et 2021 à 3,5 Millions d'euros. Au regard de ce montant et du caractère systématique de cette pratique la Cour des Comptes a condamné le directeur à une amende d'un montant de 2 000 euros .
- Dans la seconde affaire (Arrêt n° S-2025-1195) le maire d'une commune n'avait pas mandaté dans les délais une somme à laquelle la commune avait été condamnée à verser à la victime d'un accident de chantier. Les sommes dues n'avaient été en effet, mandatées qu'une dizaine de mois après les notifications des décisions juridictionnelles et la victime n'avait été indemnisée que plus de six ans après son accident. Si la Cour des Comptes reconnaît que les difficultés de trésorerie pouvait justifier un obstacle au paiement, elle estime en revanche que cet argument ne pouvait pas être invoqué pour justifier le retard dans le mandatement. Au vu de ces circonstances, la Cour a condamné le maire à une amende de 4 000 euros.
Concernant le montant des amendes auxquelles peuvent être condamnés les gestionnaires publics pour ce type d'infraction, une décision du Conseil Constitutionnel a apporté récemment des précisions sur leur montant plafond..
Ainsi, dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (décision n° 2025-1148 du 18 juillet 2025) le Conseil Constitutionnel a été amené à se prononcer sur le caractère non conforme à la constitution de l'article L131-17 du code des juridictions financières.
Cet article prévoit à l'égard des gestionnaires publics qui ont commis des infractions prévues aux articles L.131-9 à L.131-15 du code des juridictions financières, telles que celles présentées ci-dessus, et qui perçoivent une rémunération n'ayant pas le caractère d'un traitement ou d'un salaire, un plafond spécifique d'amende. Il est ainsi mentionné dans l'article L.131-17 que le montant de cette amende ne peut excéder la moitié de la rémunération annuelle correspondant à l'échelon le plus élevé afférent à l'emploi de directeur d'administration centrale.
Or, pour les mêmes infractions, commises par des gestionnaires publics percevant un traitement ou un salaire, le montant plafond est différent. Le montant maximal de l'amende est en effet "...égal à six mois de rémunération annuelle de la personne faisant l'objet de la sanction ...".
Pour la cour cette différence de traitement méconnaît le principe d'égalité devant la loi. La Cour des Comptes déclare donc contraire à la constitution, l'article L.131-17.
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