Vos questions/Nos réponses : Un agent peut-il être candidat aux élections municipales d’une commune membre de l'établissement intercommunal qui l'emploie ?

Le code électoral liste une série de cas d’inéligibilités et d’incompatibilités.

L’inéligibilité correspond à une situation de fait, souvent due à l’exercice d’une fonction particulière, qui fait obstacle à une candidature. Elle a pour conséquence de rendre illégale l’élection du candidat.

L’article L.231 prévoit plusieurs causes d’inéligibilité.

Son 2ème alinéa indique notamment que « ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent leurs fonctions depuis moins de 6 mois : (…)

8° les personnes exerçant, au sein (…) d'un établissement public de coopération intercommunale [EPCI] à fiscalité propre (…), les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président (…) ».

Cette disposition fait l’objet d’une jurisprudence particulièrement riche, le juge de l’élection précisant qu’il lui appartient, saisi d’un grief relatif à l’inéligibilité d’un candidat à une élection municipale, de rechercher, lorsque le poste que l’intéressé occupe au sein d’une collectivité territoriale n’est pas mentionné en tant que tel au 8° de l’article L.231, si la réalité des fonctions qu’il exerce ne lui confère pas des responsabilités équivalentes à celles mentionnées par ladite disposition (CE, 17 oct. 2012, n° 358762).

A cet égard, le Conseil d’Etat n’a pas hésité à faire tomber sous le coup d’une inéligibilité des agents d’un EPCI dès lors que ces derniers exerçaient un pouvoir décisionnel, même en l’absence de délégation de signature, au moins équivalent à celui d’un chef de service (CE, 1er octobre 2014, n° 383557 : inéligibilité au conseil municipal d’une personne affectée sur un poste de chargée de mission au sein d’un EPCI à fiscalité propre, titulaire du grade de directeur territorial sans délégation de signature et placée sous l’autorité du directeur général des services, qui ne fournit aucune indication relative à la mission dont elle est chargée).

Il a néanmoins été précisé qu’un agent ne saurait être assimilé à l’une des situations visées par l’article L.231 susvisé « eu égard à la nature des tâches qui lui étaient confiées, qui était de pure exécution, [et] les fonctions qu’ [il] exerçait qui ne lui conféraient aucun pouvoir de décision » (CE, 10 juillet 1996, n° 174111).

 Il convient de signaler que l’éligibilité (ou l'inéligibilité) s'apprécie au jour de l'élection, et plus précisément à la date du premier tour de scrutin (CE, 20 mars 2009, n° 322003).

Ainsi, un directeur général adjoint est inéligible si, au premier tour des élections, il exerçait ses fonctions, ou qu’il n’avait pas cessé de les exercer depuis plus de six mois (CE, 24 juillet 2009, n° 327351).

Concrètement pour une élection dont le premier tour est fixé au 1er mars de l’année N, le fonctionnaire doit avoir cessé ses fonctions au 1er septembre de l’année N-1 (à titre d’exemple, pour les prochaines échéances, si le 1er tour devait se tenir le 15 mars 2026, l’agent devrait avoir cessé ses fonctions le 15 septembre 2025).

L’incompatibilité fait obstacle à la détention simultanée, soit de plusieurs mandats, soit d’une fonction élective avec une fonction professionnelle précise. Si elle n’empêche pas la personne d’être élue, elle lui impose en revanche de choisir entre la fonction élective et celle qui lui est incompatible.

Ce sont les dispositions des articles L.237 et suivants qui fixent une série d’incompatibilités propres aux conseillers municipaux et communautaires.

En particulier, l’article L.237-1 prévoit que « I. - Le mandat de conseiller municipal est incompatible avec l'exercice d'un emploi salarié au sein du centre communal d'action sociale de la commune.

Le mandat de conseiller communautaire est incompatible avec l'exercice d'un emploi salarié au sein du centre intercommunal d'action sociale créé par l'établissement public de coopération intercommunale.

II. - Le mandat de conseiller communautaire est incompatible avec l'exercice d'un emploi salarié au sein de l'établissement public de coopération intercommunale ou de ses communes membres ».

L’agent employé par le groupement ne sera pas concerné par les causes d’inéligibilité susvisées s’il n’exerce aucune fonction d’encadrement et que ses missions se limitent à des tâches d’exécution.

Dans le cas contraire, plusieurs options s’offriraient à lui pour qu’il puisse se présenter aux élections municipales, sans pour autant démissionner.

Il pourrait notamment, changer de poste au sein de l’EPCI. La doctrine ministérielle considère en effet qu’ « une personne ayant cessé d'exercer l'une des fonctions mentionnées au 8° de l'article L.231 du code électoral, six mois avant le premier tour de scrutin pour exercer, au sein du même EPCI, un autre emploi salarié [non visé à ce même article], est éligible au mandat de conseiller municipal d'une commune membre de l'EPCI » (réponse ministérielle à question écrite n° 28889 du 11 juin 2013, JO AN du 10 septembre 2013).

A titre informatif, l’intéressé pourrait également :

▪ Se mettre en disponibilité : le candidat en disponibilité est éligible (CE, 17 juin 1991, Elections municipales de Lodève, n° 117855 ; CE, 9 janvier 2009, Elections municipales de Fatu-Hiva, n° 317576). Il est alors placé « hors de son administration » et n’a plus la qualité d’agent salarié de la commune (CE, 16 octobre 1996, Elections municipales de Venelles, n° 173889).

▪ Demander un détachement : est éligible l’agent placé en position de détachement par arrêté du maire avant la date des élections, même s’il continue à bénéficier de ses droits à avancement et à la retraite dans son emploi municipal d’origine (CE, 20 décembre 1989, Elections municipales de Valence Albigeois, n° 108573 ; CE, 9 février 2012, Elections municipales de Grenoble, n° 347155).

Si l’intéressé devait être élu conseiller communautaire, il se trouverait alors dans le cas d’incompatibilité prévu à l’article L.237-1 II.

Cet agent devrait, pour faire cesser l’incompatibilité, soit démissionner de son mandat de conseiller communautaire, soit mettre fin à la fonction qui les place dans une telle situation.

Si l’agent souhaite conserver son emploi, il devra démissionner de son mandat de conseiller communautaire, sans qu’il ne soit pour autant obligé de démissionner de son mandat de conseiller municipal ou, le cas échéant, de maire ou d'adjoint.

Si les dispositions de l’article L.237 prévoient que les personnes élues au conseil municipal, en situation d’incompatibilité, disposent, à compter de la proclamation des résultats, d’un « délai de dix jours pour opter entre l'acceptation du mandat et la conservation de leur emploi » et qu’ « à défaut de déclaration adressée dans ce délai à leurs supérieurs hiérarchiques, elles sont réputées avoir opté pour la conservation dudit emploi », aucune règle similaire n’est fixée s’agissant des agents dont l’incompatibilité résulte de l’article L.237-1. Dans ces conditions, la doctrine recommande aux personnes concernées de faire un choix entre leurs fonctions et leur mandat dans les plus brefs délais, et au plus tard, à l’expiration du délai de 10 jours à compter de la proclamation des résultats.

 

 



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Paru dans :

Info-lettre n°370

Date :

15 avril 2025

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