Elaboration/Révision des PLU : les conditions de tenue d’une réunion publique en période de crise sanitaire

De nombreuses communes actuellement en procédure d’élaboration ou de révision de leur plan local d’urbanisme (PLU) s’interrogent sur les modalités d’organisation de réunions publiques dans cette période de restrictions liées à l’état d’urgence sanitaire.

Il est actuellement impossible d'organiser une réunion publique dans une salle. Pour les communes souhaitant arrêter prochainement leur document d’urbanisme, existe-t-il un risque juridique éventuel à organiser ces rencontres sous une autre forme qu’une réunion en présence ?

Rappel des modalités de la concertation dans le cadre de l’élaboration ou la révision du PLU

En vertu des dispositions de l’article L103-2 1° du code de l’urbanisme, l’élaboration ou la révision d’un PLU doit obligatoirement faire l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées.

Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont précisés par le conseil municipal (article L103-3 du code de l’urbanisme) dans le cadre de la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision (Articles L. 153-11, L153-32 et L. 153-33 du code de l’urbanisme).

Il convient donc de respecter les modalités prévues par cette délibération de prescription pour mener à bien la concertation et notamment de tenir une ou plusieurs réunions publiques si la délibération le prévoit expressément.

La tenue des réunions publiques dans le cadre du contexte sanitaire

  • Toutefois, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire en vigueur jusqu’au 1er juin 2021 (article 1er de la loi modifiée n°2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire), les réunions publiques n’apparaissent plus possibles (cf. Décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire et notamment les articles 3 et 45). En raison de ce contexte, deux solutions sont ainsi envisageables :
  • La première consiste à prévoir les réunions publiques en présence après la fin de l’état d’urgence sanitaire (donc à partir du 2 juin 2021). Il est en effet possible qu’à compter de cette date, les restrictions relatives à la tenue de réunions publiques soient levées. Tout dépendra néanmoins du contexte sanitaire, et rien ne permet d’affirmer, à l’heure actuelle, qu’un retour à la normale sera certain à compter de cette date. Ce d’autant plus que la prolongation de l’état d’urgence sanitaire est une piste étudiée actuellement par le gouvernement.
  • Une autre solution pourrait consister à organiser les réunions publiques d’ici le 2 juin (ou plus tard si d’ici là l’état d’urgence sanitaire est prolongé), par exemple, sous format dématérialisé (visioconférence), ce d’autant plus si la délibération de prescription laisse des marges de manœuvres concernant les modalités de tenue de la réunion. Il apparaît donc envisageable, sous réserve de l’appréciation du juge, de procéder à des réunions publiques à distance dès lors que ces dernières permettent de garantir les objectifs de la concertation imposés par l’article L103-4 du code de l’urbanisme et d’avoir une portée comparable à une réunion en présence.

            Dans une telle hypothèse, il sera ainsi indispensable de s'assurer que tous les publics aient un réel accès à la réunion dématérialisée : il conviendra donc d’informer suffisamment en amont de cette réunion et d’en préciser les conditions d’accès (débit internet minimum, type de logiciel ou d’application retenue pour la visioconférence, à télécharger éventuellement à l’avance) et les modalités de participation (inscription obligatoire par exemple). Il est également recommandé de prévoir des modalités d’accès à la visioconférence pour les personnes qui souhaiteraient y participer mais qui ne bénéficient pas d’un accès dématérialisé (par exemple au travers d’un point d’accès public à internet à la mairie). Le principe en la matière est de permettre que la réunion publique à distance garantisse la concertation au même titre qu’une réunion en présence.

            Dans ces conditions, il semble délicat d’organiser une telle réunion avant l’achèvement du troisième confinement. En effet, l’accueil de personnes non équipées de l’outil numérique parait difficile : d’une part, l’objet de la réunion ne constitue pas un motif dérogatoire de déplacement et d’autre part, les lieux dans lesquels seraient accueillis les personnes qui n’ont pas d’accès internet ne peuvent plus accueillir du public (cf. article 45 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020).

Les risques contentieux liés à la concertation

Les modalités d’organisation et de déroulement de la concertation sont susceptibles de présenter un risque contentieux à l’encontre de la délibération approuvant le PLU. Certes, l’article L600-11 du code de l’urbanisme précise que : « Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux articles L103-2 et L300-2 ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies aux articles L103-1 à L103-6 et par la décision ou la délibération prévue à l'article L103-3 ont été respectées ».

Pour autant, les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération prescrivant la révision du document d'urbanisme demeurent invocables à l'occasion d'un recours contre le document d'urbanisme approuvé (Conseil d’Etat, 5 mai 2017, n°388902).

Il en résulte que la concertation doit se dérouler dans les conditions fixées dans la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision du PLU. Le fait d’organiser une réunion publique à distance qui offre les mêmes garanties qu’une réunion en présence, ne devrait pas être de nature à remettre en cause la validité de la procédure.

En conclusion

L’élaboration ou la révision d’un PLU impose de mener une concertation préalable. A cet effet, la délibération de prescription peut prévoir l’organisation d’une ou plusieurs réunions publiques. Au regard du contexte sanitaire actuel, qui interdit des réunions publiques en présence, deux solutions sont envisageables :

  • La première consiste à reporter cette première réunion après la fin de l’état d’urgence sanitaire (prévue le 2 juin 2021) sous réserve que la situation sanitaire permette après cette date la tenue d’une telle réunion. Le gouvernement étudiant actuellement l’hypothèse d’une prolongation de l’état d’urgence sanitaire, il reste difficile de s’engager avec certitude sur un calendrier avec cette solution ;
  • La seconde consiste à organiser une réunion publique à distance (visioconférence) après la fin du confinement et d’ici le 2 juin (ou plus tard si l’état d’urgence sanitaire est prolongé). Dans ce cas de figure, les modalités matérielles d’accès et de déroulement de la réunion devront permettre de garantir la concertation, au même titre qu’une réunion en présence. Il faudra vous assurer que toutes les personnes qui veulent y participer puissent y avoir accès (par exemple, les personnes âgées), par exemple avec la mise à disposition d’un poste informatique dans la mairie (et/ou un autre lieu selon le nombre de personnes qui se seraient fait connaître), prévoir une inscription préalable et bien sûr communiquer largement sur la tenue de la réunion.

La possibilité de prévoir plusieurs réunions de ce type permettrait également de garantir une bonne concertation (plus de créneaux disponibles à distance, possibilité d’accueillir plus de monde en présence à la mairie). Dans un souci de transparence, il conviendra simplement de s’assurer de la diffusion d’un même volume d’information quelle que soit la réunion.



Nous vous rappelons que HGI-ATD ne répond qu'aux sollicitations de ses adhérents. Toute demande de documentation, conseil ou assistance ne respectant pas cette condition ne pourra aboutir.

Paru dans :

Info-lettre n°287

Date :

1 mai 2021

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