Vos questions/Nos réponses : Création d’une porte d’entrée donnant directement sur la chaussée : la commune peut-elle refuser ou limiter le droit d’accès au riverain ?

Le propriétaire riverain d’une voie publique dispose d’un droit spécifique, qualifié d’aisance de voirie qui lui permet notamment d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule.

Dans un arrêt de 2016, le Conseil d’Etat a ainsi clairement posé que : « Sauf dispositions législatives contraires, les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété, et notamment, d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule. Dans le cas d'une voie communale, le maire ne peut refuser d'accorder un tel accès, qui constitue un accessoire du droit de propriété, que pour des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique. Lorsque l'accès à la voie publique avec un véhicule est de nature à mettre en cause la sécurité de la circulation, le maire n'est pas tenu de permettre l'accès en modifiant l'emprise de la voie publique. Toutefois, il ne peut refuser un tel accès sans rechercher si un aménagement léger sur le domaine public, qui serait légalement possible, ne serait pas de nature à permettre de faire droit à la demande dans de bonnes conditions de sécurité. La réalisation et l'entretien de cet aménagement destiné à assurer la sécurité de la circulation sur la voie publique incombent à la commune, mais l'autorisation peut être subordonnée à la condition que le pétitionnaire accepte de prendre à sa charge tout ou partie du coût de la réalisation et de l'entretien de l'aménagement en cause, compte tenu de son utilité éventuelle pour des besoins généraux de la circulation sur la voie publique » (CE, 15 décembre 2016, n° 388335 ; voir également : CAA de Versailles, 12 juin 2020, n° 18VE03193 ou encore CAA de Versailles, 8 juillet 2022, n° 20VE03005).

Conformément à la jurisprudence citée ci-dessus, lorsqu’un propriétaire riverain envisage la création d’une porte d'entrée avec accès directement sur la route, le maire ne peut pas s’opposer ou restreindre l’exercice du droit d’accès, sauf s’il démontre qu’une telle décision est justifiée par des raisons liées à la conservation et à la protection du domaine public ou à la sécurité de la circulation sur la voie publique.

Or, si sortir à pied d’une habitation directement sur une chaussée peut effectivement présenter des risques pour les habitants de la propriété riveraine (mais pas nécessairement pour les autres usagers de la route), cela reste une situation assez commune en agglomération et il appartient au riverain d’une voie publique de prendre toutes les mesures normales qui s'imposent lorsqu’il emprunte la voie publique en sortant de sa propriété.

Ce droit d’accès pourrait néanmoins être limité s’il apparaissait que la sortie à pied présente des dangers importants pour le riverain (forte circulation, visibilité très restreinte des conducteurs, …). Mais dans une telle hypothèse, et conformément à la jurisprudence précitée, il serait alors possible d’imposer des aménagements légers afin de sécuriser un tel accès. Sur ce point, il convient néanmoins de relever deux éléments :

- Tout d’abord, la jurisprudence administrative ne prévoit de tels aménagements que pour les accès en véhicule. Aucun exemple n’est venu imposer un tel aménagement pour un accès piéton, ce qui semble démontrer que le droit d’accéder à pied à sa propriété à partir de la voie publique est plus fort qu’avec un véhicule (et que le risque d’atteinte à la sécurité de la circulation est moins prégnant).

- Par ailleurs, si des aménagements pourraient être imposés (et financés par le demandeur), il faut que ces derniers soient légers et ne s’avèrent pas hors de proportion avec la création de l’accès, au risque de mettre en cause la réalité du droit d’accès du riverain.  

En toute hypothèse, Il appartient au maire d’apprécier si la création d’une telle ouverture directement sur la voie publique présente effectivement un risque pour la circulation publique justifiant l’adoption de mesures de sécurisation de l’accès. A cet effet, il peut être conseillé au maire de prendre l’attache des services de la voirie de l’EPCI compétent pour avoir son avis. A titre d’exemple, il pourrait être imposé (si cela n’est pas fixé dans l’autorisation d’urbanisme) que l’ouverture de la porte se fasse vers l’intérieur de l’habitation et non en saillie sur la rue pour éviter de gêner la circulation.



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Paru dans :

Info-lettre n°340

Date :

15 novembre 2023

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